L'homme riche de l'Évangile avait placé son espérance dans des biens incertains : Mon âme, disait-il, tu as beaucoup de biens en réserve pour des années ; repose-toi, mange, festoie !Mais du ciel une voix le reprend : Insensé, cette nuit-même on va te demander ton âme, et ce que tu as préparé, pour qui sera-ce ?(Luc 12, 19-20). Lui qui espérait jouir longtemps de l'abondance de ses biens, furt enlevé du monde cette même nuit ! Lui qui, en engrangeant tant de réserves, étendait si loin dans l'avenir sa prévoyance, ne vit même pas l'unique journée du lendemain ! (...) L'âme attachée à des biens qui ne font que passer, perd très vite sa propre stabilité. Le courant de la vie actuelle entraîne celui qu'il porte, et c'est une folle illusion, pour celui qu'emporte le courant, de vouloir s'y tenir debout (...). Plus on ressent de joie à posséder des biens ici-bas, moins on ressent de douleur à être privés des biens éternels, et inversement, on est d'autant moins marri de manquer de biens temporels que l'on attend avec plus de confiance ceux que nous réserve l'éternité.
Saint Grégoire le Grand, Moralia22, 2.