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Voyage - Page 2

  • vacances à Barcelone

    On dit que près de trois mille avant notre ère
    Les hommes d'Hamilcar Barca unis donnèrent
    Pour nom Barcino à l'actuelle Barcelone
    Capitale et fleuron de cette Catalogne.

    Les deltas du Besós comme du Llobregat
    À sa noblesse n'ont pas causé de dégâts
    Mais ont contribué au contraire à façonner
    Le cachet que Dame nature lui avait donné.
    medium_Barcelone1.jpg
    Sur le Tibidabo plusieurs engins volants
    Ajoutent à la ville un aspect affriolant
    Mais à Montjuich s'exposent les nombreux arts locaux
    Qui sollicitent plus encore le cerveau.

    Auprès du port s'étend un vrai quartier gothique.
    Ses joyaux autorisent de nuit des jeux scéniques.
    Les Ramblas convient à la distraction typique
    — le paseo — un passe-temps des Ibériques.

    Mais Barcelone étale aussi d'autres atouts.
    La Catalogne avec l'empire fit un tout,
    Charlemagne délia aux accents du tocsin
    La ville et sa région des mains des Sarrasins.

    La Catalogne ensuite s'unit à la Provence
    Et devint pour quelque temps comme un bout de France.
    Après avoir fait à Louis XIII leur hommage
    Loyal, les Catalans reçurent sans dommage

    Un prince de famille royale, un Bourbon
    Ayant, c’est bien banal, Louis pour premier prénom.
    Il laissa dans tous les cœurs un autre renom
    Que bien plus tard les troupes du grand Napoléon.

    Mais Barcelone ne serait pas Barcelone
    Sans la rupture d’un visage monotone
    Qu’un Gaudí, rempli de génie, a initié :
    Des arcs paraboliques, des piliers inclinés
    medium_Barcelone.jpg
    Au palais Güell, et des colonnes à hélice
    Qui s'offrent à nos yeux comme autant de délices
    Chez Vicens et Battló, à la Sainte Famille
    Avant tout, qui de nos jours encore s'habille.
    medium_Barcelone2.jpg
    Et ce sanctuaire ne saurait faire oublier
    Un autre qui, lui, n'a plus besoin d'ouvriers.
    Je veux parler de Notre-Dame de la Merci
    Patronne et protectrice des habitants d'ici.

  • vacances à Las Vegas

    Devant quel dieu faudra-t-il s’immoler un jour ?
    Celui de Las Vegas qui habille de fièvre
    Ces hommes qui, en automates, nuit et jour
    Vivent en attendant un idéal aussi mièvre ?
    medium_LasVegas.jpg
    L’attente d’un gain, dans l’espérance fiévreuse
    Prolongée au-delà du simple supportable.
    Attente qui de jour en jour un peu plus creuse
    Des visages qui sont loin d’être charitables. (lire la suite)

  • Un voyage en Corse (suite et fin)

    (suite du récit de voyage de Fernand Le Tourneau en Corse, en 1909)

    Le lendemain au départ, temps couvert : nous voyons la côte et la mer, mais les montagnes du Cap sont dans les nuages, et aussi l’Ile [Rousse] que nous ne devrions pas perdre de vue.
    medium_CapCorse.jpg
    La route suit la côte, qui est très découpée, contournant chaque golfe et chaque ravin, tantôt montant, tantôt descendant ; elle est parfois taillée dans le roc, qui descend à pic jusqu‚à la mer. Les roches sont blanches, vertes, noires, mais surtout vert clair, creusées par le vent et la pluie en forme de coupe, les maquis vont souvent jusqu‚à la mer, et les chênes verts sont nombreux, bien plus avancés ici qu’auprès d‚Ajaccio ; le feuillage nouveau a presque remplacé celui de l’an dernier. Des cultures en terrasses autour de chaque village.

    Nous nous arrêtons pour déjeuner à la Marine d’Albo : quelques maisons de pierre, la Douane et l’auberge, dominées par la Tour génoise. Le téléphone annonçant notre venue n’est pas encore arrivé, et nous déjeunons de saucisson, œufs et poisson.

    Après déjeuner, nous regardons les drôleries d’un perroquet, donné à l’aubergiste par son fils, marin au service de l’État. Il épuce un vieux qui doit être de ses amis, et lui becquette les yeux et la bouche. Il becquette aussi la bouche de la jeune servante, jolie fille aux beaux yeux et au joli teint, qui lui tend amoureusement les lèvres, les yeux mi-clos. À qui songe-t-elle ?

    Nous allons voir emballer dans des sacs le poisson pêché la veille sur la côte de l’Ile Rousse, et séché au soleil pendant vingt-quatre heures : espèces d’anguilles de mer à peau tigrée, qu’ils appellent morenas [murènes ?]. Cela permet de les conserver et de les transporter plus loin.

    Le temps s’était levé, et, soudain, en face de nous, au-dessus de la côte et des nuages qui la couvraient, très hautes, les montagnes toutes blanches, vite cachées à nouveau par les nuages. Quand le temps est tout à fait clair, ce doit être magnifique.

    Nous passons à Nonza, perché sur un haut rocher à pic sur la mer, et, continuant à longer la côte, arrivons à Saint-Florent en même temps que la fraîcheur du soir. Promenade dans la ville, où la jetée sert de latrines, où les enfants chantent faux les cantiques à l’église, et où les petites filles chantent en français des rondes sur la promenade ombragée de platanes.

    19 mai. Départ de bonne heure pour Bastia. La route monte le long d’une vallée bien arrosée, et même marécageuse par endroits. Beaux pâturages, beaux chênes verts, beaux oliviers. On passe en vue d’un village pittoresquement étagé au flanc du coteau, Oletta, puis on monte dans les châtaigneraies et les pâturages au col de San Stefano, d’où la vue est étendue sur les deux vallées et les deux mers. La route traverse en descendant le défilé du Lancone, très abrupt du côté de la route, le torrent dans le fond du ravin, très profond, le maquis couvrant les pentes du haut en bas, la vallée plus large, et la mer au fond du défilé. Descente sur la mer et sur Bastia par une route très cahoteuse, et un soleil très chaud.

    Il fait très chaud ici ; nous avons repris notre chambre, relativement fraîche, et d’où l’on entend les hirondelles, et les sonneries trop fréquentes de l’église voisine.

    Nous avons été satisfaits de notre séjour à Bastia, qui est pittoresque et animée. Nous avons seulement un peu souffert de la chaleur, et faisions la sieste après déjeuner jusqu’à 3 heures. Après, nous prenions une voiture ou un des trams qui sillonnent la ville, pour faire une promenade aux environs.

    Jeudi, nous sommes allés aux grottes de Brando et à Erbalunga, à huit kilomètres de Bastia, sur la route du Cap. Les grottes sont à mi-hauteur, à flanc de coteau, d’accès très facile, avec escaliers bien aménagés. Elles se composent de deux salles, pas très grandes, dont les parois et les voûtes sont entièrement garnies de stalactites et de concrétions calcaires. L’éclairage est assez curieux : ce sont des bougies et des lampes à huile comme celles de Pompéi. Le gardien va en avant les allumer avant de commencer la visite.

    Erbalunga, qui est à côté, est un petit village bâti sur un promontoire : du côté de la terre, où il y a peu de largeur, il y a la place et les cafés où l’on prenait l’apéritif, car c’était fête. Le lavoir couvert avec eau courante, et la Marine, où l’on était en train de mettre à l’eau les barques, tirées sur le sable avec des poulies. Après, il n‚y a plus qu’une ruelle centrale, et des maisons baignant de chaque côté dans la mer. De temps à autre, entre deux maisons, une descente à l’eau sur le roc. À l’extrémité, adossée à une maison, une tour génoise en ruine. Le village est aussi pittoresque de l’extérieur que de l’intérieur, et c’est un des plus jolis coins de Bastia. Près de l’église, il embaumait un mélange de roses et de citronniers.

    Hier matin, promenade à pied de 5 heures un quart à 8 heures sur les collines qui avoisinent Bastia : soleil déjà chaud, et un peu de brume. Mais on passe par des sentiers à travers champs, montant, descendant, traversant un ruisseau à gué, longeant un vieux fort ruiné. Les haies sont couvertes de fleurs : roses, chèvrefeuilles, orangers, citronniers, fleurs du maquis. De la vue presque tout le temps.

    L’après-midi, promenade en voiture du même genre, passant plus au nord, et montant plus haut. Nous sommes passés devant quelques bouchons [cabaret], où, l’été, les Bastiais viennent chercher un peu de fraîcheur, et avons fait le tour de Cardo, petit village pittoresquement juché sur un éperon de montagne, et en sommes descendus par une route défoncée par les charrois des carriers et des ardoises de mauvaise qualité, exploitées à flanc de coteau en bordure de la route. Quel chaos, et que de tournants brusques !

    La vue est beaucoup plus nette que le matin, très étendue et très variée d’aspect. Nous voyons Bastia de très haut et sous toutes ses faces, et, peu à peu, les ombres s’allongent et gagnent Bastia, tandis que la mer et les bateaux sont encore tout éclairés.

    La campagne est très bien cultivée : légumes, vignes, beaux oliviers. Dans le fond des vallées, bois ombreux et de l’eau qui sourd de tous côtés. Nombreuses chapelles funéraires, toujours situées à un endroit d’où la vue est belle.

    Le cocher, qui est du pays mais a voyagé, y est rentré pour ne pas rester éloigné de sa mère. Les chevaux et la voiture sont à lui, et il se fait de bonnes journées, ayant gagné la veille 45 francs ; il est vrai que c’était fête, et qu’il a marché toute la journée. L’été, il va aux eaux d’Orezza, et gagne de 45 à 50 francs par jour à mener les baigneurs des hôtels aux eaux à 1 franc par tête et autant au retour. La vallée où sont les eaux est malsaine, et l’on habite dans les villages sur les hauteurs à une certaine distance. Il y a dans la région un bandit qui, il y a deux mois, a tué un brigadier et deux gendarmes et est activement recherché. Il y en a donc encore !!!

    Les ouvriers agricoles gagnent de 2.25 à 2.50 par jour ; il est vrai que la vie est très bon marché : les petits pois se vendaient la veille au marché 0.05 le kilo, et, à la suite d’une pêche abondante, le poisson 0.20 la livre, les langoustes 0.75 la livre ; les fraises en saison valent 0.05 la livre, et les figues fraîches 0.05 les quarante, le vin naturel 0.30 le litre, et, quand la récolte est abondante, comme l’an dernier, certains propriétaires, faute de futailles pour le loger, le donnent pour rien à qui veut l’emporter. Une maison de sept pièces coûte 10 francs par mois de loyer.


    * * *

    Nota : une voiture, à l’époque, n’est pas une voiture automobile (celles-ci sont encore très rares), mais une voiture tirée par un ou deux chevaux et dirigée par un cocher ; c’est un taxi hippomobile.

  • Un voyage en Corse

    Un de mes cousins, Louis Le Tourneau, a retrouvé de vieux papiers de famille et a pris la peine de transcrire un récit de voyage rédigé par mon arrière grand-oncle, Fernand Le Tourneau (1875-1959).

    SÉJOUR à BASTIA et TOUR du CAP CORSE par M. et Mme Le Tourneau, Mai 1909
    medium_Bastia.jpg
    Dimanche après-midi, nous sommes allés nous promener dans la ville, et sur la côte, où le tramway nous a amenés à trois kilomètres pour 0.20 [francs]. Le tramway est un petit break de 6, où l’on a la prétention de faire tenir jusqu’à 10 personnes, du même modèle que les fiacres de la ville. (lire la suite)

  • Voyage à Persépolis

    Il est en Orient une ville très légendaire
    Dont l’évocation frappe toujours l’imaginaire.
    Elle est vieille de deux mille six cents ans
    Et fut détruite par Alexandre le Grand.

    Quant au motif de ce geste dévastateur,
    Nul ne le sut jamais, un instinct prédateur
    Devant néanmoins être exclu. Mais revenons
    À Persépolis, car tel est son si beau nom.
    medium_Persepolis.jpg
    Ville mythique que fonda Darius Ier
    Qui n'hésita pas à puiser dans le grenier
    Parmi les arts de son siècle les plus toniques :
    Colonnes cannelées relevant de l'ordre ionique,

    Et de la riche Égypte les salles hypostyles,
    De Mésopotamie des frises dont le style
    Grandiose et guerrier est présent à notre esprit
    Pour l'avoir souvent vu reproduit ou décrit.
    medium_Persepolis1.jpg
    Ledit Darius fit percer un canal du Nil
    À la Mer Rouge, pour recevoir du fournil
    Le pain doré, des fruits divers et les barriques
    Qu'il réglait avec sa monnaie, les dariques.

    N'oublions pas qu'il fut battu à Marathon
    Défaite que voulut venger son rejeton
    Xerxès après Platées puis hélas Salamine,
    Mycale enfin, dut faire une bien grise mine.

    À Persépolis, il rehausse la splendeur
    Des temples et remet plus encore à l'honneur
    Les cohortes sans fin de ses vaillants soldats
    Dont les faits d'arme sont pourtant sans grand éclat.

    Quant à Artaxerxès, son fils, qui lui succède,
    C'est par un bain de sang qu'à son trône il accède.
    Il sait se montrer à l'occasion magnanime
    Et même accueille le vainqueur de Salamine,

    Thémistocle, sur le tard frappé d'ostracisme
    À Athènes même, et, ignorant tout racisme,
    Il accepte que ce qui reste d'Israël
    Rentre à Jérusalem, s’y trouvant comme au ciel.

    Persépolis connaît, sous son gouvernement,
    Une floraison de parures, d'ornements.
    Chez les Achéménides, elle apparaît vraiment
    Comme étant la cité au meilleur agrément.


    (Poème inédit)

  • Voyage à Lisbonne

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    Une conque ouverte en grand, tournée vers le large
    Montre une perle au grand jour, vraie, étincelante,
    La splendide parure de l'estuaire du Tage
    Qu'Hélios à son zénith fait reluire éclatante.

    L'antique Olisipo, municipe romain,
    Servait d'escale vers les îles mythiques,
    Oui les Cassérides, productrices d'étain,
    Même pour les Ibères venus de la Bétique.

    La civilisation arabe y imprima
    Son caractère, gloire des califats jadis,
    Encore visible dans le quartier d'Alama
    Et Lisbonne devint un coin de paradis.

    Aujourd’hui elle l’est encore,, assurément.
    Ce n'est pas l'apport de l'époque médiévale,
    Si présent dans les hauteurs, qui le dément.
    Et sa splendeur par vagues vers l’océan dévale.

    À cet endroit, le fleuve s'appelle mer de Paille
    Il prit part aux combats des maures et des croisés
    Et en accueillit une abondante tripaille
    Qu'on pouvait oui-da la mesurer au toisé.
    medium_Lisbonne1.jpg
    L'histoire à chaque époque remodèle les arts.
    Voici le monastère dit des Jeronimos
    Et la tour de Belém, manuéline, à l'écart
    Puis l’infinie richesse de ses azulejos.

    Au siècle des Lumières ici on aménage
    La place du Commerce dedans la ville basse.
    Elle sert de socle à ses différents étages
    Dont la beauté bauté d’un lieu à l’autre se surpasse.

    Ses habitants, aimables autant que travailleurs,
    Ont su accommoder l’ancien et le moderne.
    Fiers marins, ayant le regard tourné ailleurs,
    Ils ont édifié une audacieuse poterne.

    C'est le pont Vasco de Gama qui d'une rive
    À l'autre enjambe, altier, le cours des eaux sereines.
    L'imagination trop sollicitée dérive
    Et couronne Lisbonne, faisant d’elle sa reine.

  • bonnes vacances

    À ceux qui partent à la montage… et aux autres, je dédie ce poème :

    GLACIER

    medium_GlacierBossons.jpg
    Dans cette masse blanche démesurée
    Aux dimensions qui frisent le fantastique
    Une vie souterraine reste emmurée
    Dans nos régions tout comme dans l'Antarctique.

    Le peuple de l'eau habitait ses cavernes
    Et ses crevasses lançaient de sourds messages.
    Des êtres cachés fréquentaient des tavernes
    Se frayant dans la glace d'obscurs passages.

    Les parois bleuies exsudaient des ruisseaux.
    Ils sourdaient par millions, ouvrage inattendu
    De la nature, scintillants vermisseaux
    Reflétant le soleil d'un air entendu.

    Des torrents s'étouffaient au fond des abîmes
    Des cascades sabraient d’étonnantes failles
    Les murs rigides mais vivants, et des cimes
    Chutant en grondant y creusaient des entailles.

    Les eaux profondes venaient à la surface
    Tantôt timide sueur coulant des pores
    De la glace, tantôt dans un volte-face
    Vastes cataractes surgissant d'un port.

    Derrière les jeux d'eau il y a la vie
    Cachée du glacier. Des explosions lointaines
    Indiquaient qu'on avait atteint le parvis
    D'une cathédrale grave et souterraine.

    De voûte en voûte l'écho marquait les chocs
    D'une masse qui ignore le repos.
    Des craquements prouvaient la tension des blocs
    Leur dommage, soulèvement et dépôt.

    De temps à autre un pan du glacier bougeait
    Comme un homme qui remue dans son sommeil
    L’irruption d'un songe l'ayant dérangé
    Et suggéré on ne sait quelle merveille.

    Le fracas des eaux, les jeux de la lumière
    Créant une féerie toujours nouvelle
    Sont l’invitation au for de ma chaumière
    À tourner pas et regards vers l'Éternel.

  • Mosaïques de Saint-Démétrius (Istanboul)

    Les mosaïques de Saint-Démétrius de Thessalonique sont connues grâce aux travaux entrepris par mon grand-père, Marcel Le Tourneau (1874-1912), à qui le ministère de l’Instruction publique avait confié la mission d’étudier les monuments byzantins de Salonique, au printemps 1907 (lire la suite)

  • vacances à la mer

    À ceux qui peuvent prendre des vacances au bord de la mer, je dédie ce poème… et aux autres aussi.

    YACHT
    medium_Yacht.jpg
    Une odeur de girofle ainsi que de cannelle
    Baignait sur le yacht mon bien modeste logis
    Sur les murs dansait une drôle de ritournelle
    Des ombres frémissantes venant d’une bougie.

    Des tentures vieillies affichaient les stigmates
    Du grand Hélios, témoins d'aventures lointaines
    L'éclat des ors avait disparu, et le mat
    Avait arraché une réussite incertaine.

    Nous avions, à l'escale, pris une cargaison
    De coriandre. Ailleurs un obscur potentat
    S'y intéressa, mais hors de toute raison
    L'imagination fit que ce fait me hanta.

    Sagement alignées sur la longueur du quai
    Des maisons colorées comme des entremets
    Chevauchaient hardiment de sordides troquets
    Où le matelot, las mais heureux, se remet.

    Le carillon jette à pleine main sa monnaie
    D'or et d'argent et de cristal sur le village
    Un gars s'éloigne la tête dans son bonnet
    Peut-être pressent-il l’approche de l’orage.

    Plus près le tintement aigre du virginal
    Déchiquette au petit matin le brouillard blême
    L'âme est saisie par son sanglot original
    Et salue le soleil qui pointe, fier emblème.

    Un lit baroque qui me fut donné en gage
    S'avançait qui voulait m'écraser par l’entrave
    Semblable à un galion prêt à faire naufrage
    J'en perdais le repos, même au fond de mon havre.

    Les furtives odeurs des chalands dans la nuit
    Refoulaient vers mon alcôve l'arôme des épices
    Sons et fragances dans le yacht chassaient l'ennui
    Inquiet pourtant, l'esprit craignait des maléfices.

    Le sablier du temps coulait sur notre monde
    Du sable recouvrait partout les moindres formes
    Il n'y aurait bientôt plus rien à bord d'immonde…
    Et le yacht s'évanouit devenu ombre informe.medium_Yacht1.jpg

  • Suite du voyage à Pompei et au Vésuve

    Suite du récit du voyage à Pompéi et au Vésuve en 1866

    9 juin. Je suis installé tant bien que mal à Pompéi depuis deux jours. Parti le 5 au matin de Rome, je suis arrivé le soir à Naples, et ai passé la matinée à porter des lettres dont on m’avait chargé à Rome, la poste décachetant parfois les lettres. À Pompéi, j’ai choisi pour étude la dernière maison découverte, intéressante par ses vastes dispositions, un très grand atrium, des cuisines, des chambres, un escalier et deux portes d’entrée, une grande et une petite, et sur la rue, il y avait une terrasse avec balustrade, maintenant détruite, à laquelle on arrivait par un escalier de six marches existant encore.


    Cette maison n‚a pas encore été relevée ; elle n’est même pas sur le plan, et, en ce moment, on finit de découvrir le jardin.

    Le temple de Junon est en réalité un temple de Vénus, médiocrement intéressant, car il ne reste que les quatre murs sans aucune décoration.

    Je suis toujours enthousiasmé de cet admirable panorama du Golfe à Pompéi, mais je n’y suis pas bien confortablement. Je suis ici avec deux peintres, et nous vivons ensemble comme si nous nous connaissions depuis notre naissance. Tous les jours, lorsque les fouilles ferment, à 6 heures, je vais prendre un bain de mer, ce qui me remet de la grande chaleur que j’ai à supporter dans la journée.


    17 juin. Mon séjour ici s’est prolongé pour plusieurs raisons : d’abord, pendant trois jours, nous avons eu des orages effrayants, accompagnés ou suivis de pluies torrentielles qui m‚obligeaient à cesser tout travail ; puis on n’avait pas encore entièrement déblayé le jardin, et je voulais voir si on y trouverait des choses utiles à mon travail. Ce jardin est maintenant complètement fouillé : on n’y a trouvé que des jattes [sic] à lait en terre de très grandes dimensions ; le lait, par suite de la chaleur, s’est solidifié, et a diminué de volume, devenu un corps gras, granuleux et s‚écrasant sous le doigt ; j’en rapporte un petit morceau qu’on m’a permis de prendre.

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    Mes études sont très longues et fatigantes à faire, parce que nous ne sommes pas installés, et travaillons sur nos genoux, ce qui n’est pas commode pour l’architecture.

    Cette semaine, j’ai fait deux excursions : d’abord, je suis remonté au Vésuve, montant par Bosco, versant opposé à celui de Portici, par où j’étais monté la première fois. Puis, le Vésuve, si tranquille la première fois, est maintenant fort méchant et tonne comme plusieurs batteries d’artillerie, et lance des pierres comme de la mitraille. Et le spectacle en valait la peine.

    Au lieu du panorama de la terre, j’avais un panorama de nuages dorés par le soleil et ressemblant à une immense mer de glaces bordée par les montagnes qui entourent le Golfe de Naples et moi seul au milieu de cette immensité. C’est un spectacle saisissant, et il l’était d’autant plus pour moi que je le voyais pour la première fois. Quant au volcan, un spectacle grandiose m’attendait ! La lave intérieure avait monté d’au moins dix mètres en se crevassant en tous sens, et laissant apercevoir le feu intérieur. À la place de la cheminée fumant à peine, où j’étais monté la première fois, il y avait un immense cône de pierres encore incandescentes, ouvert en son milieu pour laisser échapper avec un bruit effroyable des torrents de fumée sulfureuse et une pluie de pierres incandescentes lancées à plus de vingt-cinq mètres de hauteur. Spectacle grandiose et émouvant : j’aurai vu un volcan, et, dans le pays, on s’attend à une éruption dans peu de temps. Il paraît qu’à Torre del Greco tous les puits sont à sec, ce qui est un signe précurseur. On a déjà ressenti quelques oscillations.

    Ma seconde excursion a été pour San Pietro, village à deux heures de Pompéi, où il y avait une grande foire en l’honneur de San Antonio del Foco. Pour tout le pays, ce jour qui est le 13 juin est une grande fête. On a pour ce saint une grande vénération, à cause de sa puissance sur le Vésuve « il paraît qu’il a arrêté une éruption ». À cette foire, nous avons vu les plus beaux types que j’aie encore rencontrés en Italie. Les femmes y sont fort belles, et toutes dans leurs costumes, corsages décorés de dentelles ou de passementeries, jupons rouges, rubans et épingles dans les cheveux, boucles d’oreilles de forme étonnante et cependant gracieuse, collier avec mouchoir sur la gorge. Les hommes en culotte courte et en veste avec gilet rouge et chapeau de feutre noir. La population de la campagne et de la montagne dans ses habitudes et dans son costume.



    Rome, 19 juin. J’ai encore beaucoup de monuments à voir, monuments non indiqués sur les guides, inconnus des Romains eux-mêmes, et qu’il faut aller chercher dans les rues les plus affreuses de la Ville. Je vais m’occuper de les trouver tous, maisons, palais, églises, afin que Rome n‚ait plus de secrets pour moi, et que je sois bien pénétré de cette belle Renaissance de l’art en Italie, plus belle que la nôtre sous le rapport du grandiose, de la belle proportion, de la pureté des grandes lignes, mais inférieure pour les détails de l’ornementation.

    La chaleur commence à se faire sentir d’une façon tout à fait insolite pour moi. De midi à 3 ou 4 heures, il ne faut pas songer à mettre le pied dehors, sous peine de fièvres. Voici comment je règle mon temps : lever de bonne heure pour pouvoir être au travail sur les 7 heures ; rentrer, déjeuner, faire la sieste, ressortir à 3 ou 4 heures
    suivant le temps, et rentrer à 7 heures. C‚est la meilleure marche à suivre dans ce pays, et les Romains n’agissent pas autrement.

    L’excursion projetée du côté de Viterbe, Caprarole, etc. n’est pas possible en ce moment à cause des brigands.

    La guerre est tout à fait décidée, et elle va éclater d’un moment à l’autre. Le nord de l’Italie est maintenant inabordable pour les étrangers à cause de la révolution qui remue tout le pays ; on arrête indistinctement tout le monde, Italiens et étrangers à Naples. La Vénétie est tout à fait impossible à visiter.