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Il n'y a qu'une maladie mortelle, une seule erreur funeste: accepter la défaite, ne pas savoir lutter selon l'esprit des enfants de Dieu. Si cet effort personnel fait défaut, l'âme s'engourdit et se paralyse dans la solitude, et elle devient incapable de donner du fruit...
Dans cette situation de lâcheté, la créature oblige Notre-Seigneur à prononcer ces paroles qu'Il entendit du paralytique, au bord de la piscine de Siloé : "Hominem non habeo !" — je n'ai personne !
Saint Josémaria, Forge, n° 168.
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Le nom de Cana reste associé à un épisode charmant et émouvant de la vie de Jésus et de Marie, des relations du Fils de Dieu avec sa mère sur terre. Tous deux sont invités à un mariage. Les apôtres, que Jésus vient de s’attacher depuis quelques jours, y ont été aussi conviés. Il s’agit au moins d’André, de Jean, de Pierre, de Philippe et de Nathanaël (voir Jean 1, 35-51).
« Dans la foule des invités d’une de ces bruyantes noces campagnardes où accourent des gens de tous les alentours, Marie s’aperçoit que le vin vient à manquer (Jean 2, 3). Elle seule s’en aperçoit, et immédiatement. Comme ces scènes de la vie du Christ nous paraissent familières ! C’est que la grandeur de Dieu se mêle à la vie ordinaire, courante. Et c’est bien le propre d’une femme, d’une maîtresse de maison avisée, que de relever une négligence, d’être attentive aux petits détails qui rendent l’existence humaine agréable ; ainsi en est-il de Marie » (saint Josémaria, Quand le Christ passe, n° 141). « Ils n’ont plus de vin » (Jean 2, 3) dit Marie à Jésus. Est-ce une nouvelle pour Jésus, dont la finesse et la présence d’esprit dépassent infiniment celles de sa Mère ? Sans doute pas. Mais Dieu compte d’ordinaire sur les hommes, sur leur coopération, pour répandre ses grâces comme il l’entend.
Cependant aujourd’hui, à Cana, il semble ne pas vouloir faire droit à la requête, pourtant formulée par Marie : « Femme, laisse-moi tranquille. Mon heure n’est pas encore venue » (Jean 2, 4). À plusieurs reprises, les auditeurs de Jésus chercheront par la suite à l’arrêter, sans y parvenir parce que « son heure n’était pas encore venue » (Jean 7, 30 ; 8, 20). Cette heure, « où le fils de l’homme doit être glorifié » (Jean 12, 23), interviendra au moment de la Pâque, quand Jésus, « après avoir aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu'au bout » (Jean 13, 1).
La réponse de Jésus à sa Mère a pour effet de souligner sa foi — ce qu’il savait. Elle dit aux serviteurs, comme si son Fils l’avait exaucée malgré les apparences : « Faites tout ce qu’il vous dira » (Jean 2, 5). Puisque son Fils ne l’a pas écoutée directement, elle lui envoie les serviteurs pour qu’ils lui demandent ce qu’ils doivent faire, avec l’indication de se plier à ses instructions, en totalité.
C’est vers Jésus que Marie ne cesse de nous orienter, nous qui sommes les serviteurs de Dieu, pour que nous lui demandions : « Bon Maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle en partage ? » (Luc 18, 18). Il faut poser la question. Mais il faut aussi accueillir pleinement la réponse : « Observe les commandements » (Matthieu 19, 17).
Et il convient d’agir comme les serviteurs de Cana : « Remplissez d’eau ces jarres », leur dit Jésus. « Et ils les remplirent jusqu’au bord » (Jean 2, 7). Ils ne font pas leur travail à moitié, mais très consciencieusement. En le sanctifiant vraiment, en faisant attention aux moindres détails.
L’intervention de Marie a précipité « l’heure de Jésus ». « Tel fut le premier des miracles faits par Jésus. […] Et ses disciples crurent en lui » (Jean 2, 11). La foi, l’obéissance et le travail bien fait ont permis le miracle.
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Le surlendemain de la mort du Christ sur la Croix, une fois le grand sabbat de la Pâque achevé, les saintes femmes « qui étaient venues avec lui de Galilée » (Luc 23, 55), prennent « alors qu’il faisait encore nuit » (Jean 20, 1) « les aromates qu’elles avaient préparées » (Luc 24, 1) pour achever de « l’embaumer » (Marc 16, 1). Il s’agit de « Marie la Magdaléenne et de l’autre Marie » (Matthieu 28, 1), c’est-à-dire « la mère de Jacques ». Salomé est aussi présente (Marc 16, 1).
« Elles se disaient entre elles : « Qui va nous rouler la pierre de devant l’entrée du tombeau ? » Et en regardant, elles s’aperçurent que la pierre avait été roulée » (Marc 16, 3-4). « Alors qu’elles ne savaient comment interpréter la chose, voilà que deux hommes en vêtements éblouissants se présentèrent à elles » (Luc 24, 4). Elles « furent prises de frayeur » (Marc 16, 5), n’osant lever les yeux (cf. Luc 24, 5). Mais ils leur dirent : « N’ayez pas de frayeur ! C’est Jésus de Nazareth que nous cherchez. » Ils montrent ainsi qu’ils sont au courant du sens de leur démarche. « Il est ressuscité. Il n’est pas ici » (Marc 16, 6).
Voici la nouvelle la plus inouïe jamais entendue : le Christ est ressuscité ! Il est bien mort le Vendredi saint, et les saintes femmes « examinèrent le tombeau et comment le corps avait été placé » (Luc 23, 55). Mais « il n’est pas ici ». Il n’est plus dans le sépulcre. Il est ressuscité !
Marie-Madeleine, qui a tant aimé Jésus, a le privilège d’être témoin de sa première apparition. Jésus, qu’elle prend pour le jardinier, lui dit : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » Elle répond : « Seigneur, si c’est toi qui l’as emporté, dis-moi où tu l’as mis, pour que j’aille le reprendre » (Jean 20, 15). Elle s’exprime avec énergie et conviction. Elle veut son Jésus, comme nous devrions toujours vouloir être en sa présence. Jésus lui dit : « Myriam ! » Elle, se retournant, lui dit en hébreu : « Rabbouni ! » — ce qui veut dire « Maître » —. Jésus lui dit : « Ne me touche pas, car je ne suis pas encore remonté vers le Père, mais va-t-en vers mes frères et dis-leur que je vais remonter vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu » (Jean 20, 16-17).
Quand on sait le peu de cas que les hommes faisaient à l’époque de ce que les femmes disaient, et le peu de considération dont elles jouissaient dans la société, il est frappant de constater que Jésus charge précisément une femme d’aller annoncer aux disciples qu’il est ressuscité et qu’il va les « précéder en Galilée » (Marc 16, 17).
Le Christ est ressuscité. Il est vraiment ressuscité, alléluia ! La mort n’a pas pu avoir d’emprise sur lui. Il était mort quand il l’avait voulu, quand « l’heure était venue pour lui de passer de ce monde auprès du Père » (Jean 13, 1). Mais il avait parlé de son pouvoir sur sa propre vie : « Je donne ma vie, pour la recouvrer ensuite. Personne ne me la prend : c’est moi qui la donne de mon propre chef. J’ai le pouvoir de la donner et j’ai le pouvoir de la recouvrer ensuite » (Jean 10, 17-18). Jésus est ressuscité par la toute-puissance qu’il possède en tant que Dieu. Il est ressuscité !
On imagine aisément la hâte avec laquelle Marie-Madeleine court raconter aux apôtres : « J’ai vu le Seigneur. Et voici ce qu’il m’a dit » (Jean 20, 18). Mais une déception l’attendait, car « eux, en entendant dire qu’il était vivant et qu’elle l’avait vu, se refusèrent à croire » (Marc 16, 11). Non seulement ils ne croient pas, mais ils refusent d’envisager cette hypothèse : le Christ est ressuscité ! Il le leur avait pourtant annoncé.
Il faudra que Jésus se présente en personne pour qu’ils croient. Le soir de sa résurrection, jour que nous appelons Pâques, alors que les portes du Cénacle étaient « fermées par peur des Juifs, Jésus arriva et se trouva devant eux » (Jean 20, 19). Ils sont stupéfaits et n’en croient pas leurs yeux. Pour les tirer de leur hébétude, le Seigneur leur dit : « Voyez mes mains et mes pieds : c’est moi en personne. Touchez et voyez » (Luc 24, 39).
Jésus est ressuscité ! Il se montre à deux disciples, Cléophas et son compagnon, tous deux originaires d’Emmaüs, qui sont découragés et désertent. Ils ne le reconnaissent qu’à la fraction du pain et, retournant à Jérusalem reprendre leur place parmi les disciples, « ils se dirent l’un à l’autre : « N’avions-nous pas le cœur tout brûlant au-dedans de nous, quand il nous parlait en chemin, nous expliquant les Écritures ? » (Luc 24, 32). Et à Jérusalem, les frères leur dirent : « Réellement le Seigneur est ressuscité, et il est apparu à Simon » (Luc 24, 34).
Et il apparaît encore huit jours plus tard pour l’apôtre Thomas qui continuait de refuser à croire. Sans doute sa sensibilité était-elle tout particulièrement meurtrie par les événements du Jeudi et du Vendredi saints. « Il dit à Thomas : « Amène ton doigt ici et regarde mes mains ; puis amène ta main et mets-la dans mon côté. Et ne sois pas incrédule, mais croyant » (Jean 20, 27).
Jésus est ressuscité ! C’est le cœur du message évangélique. « Si le Christ n’est pas ressuscité, votre foi est sans effet ; vous êtes donc encore dans vos péchés » (1 Corinthiens 15, 17). Le Christ est ressuscité ! Faisons un acte de foi comme Thomas : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (Jean 20, 28). Oui, mon Seigneur et mon Dieu, je crois que tu es vivant, « le même hier, aujourd’hui et pour l’éternité » (Hébreux 13, 8), et que tu es ressuscité comme prémices de notre propre résurrection à la fin des temps (cf. 1 Corinthiens 15, 20-24).