Une Église de tradition arménienne
6. L'Église arménienne catholique prend ses racines à l'époque des croisades, avec la création du royaume de Petite Arménie (Cilicie). L'union, proclamée en 1198, dura jusqu'à la disparition du royaume, en 1375. L'archevêque de Leopoli, en Pologne, rétablit l'union en 1635. Mais il faudra attendre le 26 novembre 1740 pour voir les évêques arméniens qui avaient réintégré la communion avec Rome se donner un patriarche, Abraham Arzivian, évêque d’Alep. Benoît XIV confirme l'élection en 1742 et octroie au patriarche le pallium et le titre de catholicos-patriarche des Arméniens de Cilicie. Rejeté par le clergé de son siège, il fixa sa résidence au couvent de Kreim, au Liban. En 1830 la Sublime Porte ottomane reconnaît l'indépendance de la communauté arménienne catholique. Il est procédé à l'union des deux communautés arméniennes catholiques, à savoir le patriarcat de Cilicie et celui de Constantinople (1866). Le siège patriarcal est alors établi à Istanbul. Mais les massacres de 1915 et l'exode massif qu'ils entraînent amèneront le synode des évêques arméniens catholiques à le réinstaller au Liban (1918). L'Église arménienne catholique a son éparchie patriarcale en Irak (Bagdad) et compte en Syrie deux éparchies et un exarchat patriarcal, une éparchie à Ispahan, Alexandrie, Istanbul et Paris (éparchie de Sainte Croix de Paris érigée le 30 juin 1986, première éparchie orientale catholique en Europe de l'Ouest), un exarchat apostolique en Amérique latine (Argentine), un pour les États-Unis d'Amérique et le Canada (Paterson), un exarchat patriarcal à Jérusalem. Un ordinariat a été créé en Europe orientale pour les Arméniens catholiques de l'Europe de l'Est, et en Roumanie pour les catholiques de rite arménien résident dans ce pays.
Les Églises orientales catholiques de tradition chaldéenne
7. L'Église chaldéenne catholique est l’Église de Mésopotamie fondée par l’apôtre saint Thomas et remise à l’un des soixante-dix disciples, Addai, qui, avec un compagnon fonda l’Église de Séleucie et Ctésiphon. En 424 celle-ci se rendit autonome par apport à Antioche, sans rupture formelle. La dénomination d’Église chaldéenne date du concile de Florence (1445), à l’occasion de l’union de l’Église nestorienne de Chypre avec Rome. En 1233 les dominicains convertissent le patriarche de Bagdad, qui aura plusieurs successeurs catholiques. Mais ces entreprises, tout comme celles des franciscains, n'amène que des unions passagères avec Rome. À la suite des persécutions de Tamerlan le patriarche Chimoun (Siméon) IV (1437-1477) rendit l'office patriarcal héréditaire. Nombre d'évêques assyriens se choisissent alors en 1551 un patriarche, Jean Sulaka, qui est reçu dans l'Église catholique et confirmé dans sa charge par Jules III (20 avril 1553), qui reconnaît aussi sa juridiction sur les Indes. Cette dynastie finit par retomber dans le schisme avec Chimoun XIII (1662-1700) et par donner naissance à la dynastie nestorienne. Plusieurs patriarches furent catholiques, mais c'est en 1830 que Rome reconnaît Jean Hormez comme patriarche de Babylone des Chaldéens, avec siège à Mossoul. L'Église chaldéenne compte neuf éparchies en Irak dont le siège patriarcal de Bagdad, quatre éparchies en Iran dont deux sièges métropolitains (Urmya et Téhéran), une éparchie en Turquie, à Beyrouth, à Alep, au Caire et à Detroit, un exarchat patriarcal à Jérusalem. Une mission chaldéenne existe en France, en Australie et en Suède.
8. L'Église syro-malabare catholique est de vieille tradition. En effet, les chrétiens des États de Cochin et de Travancore, sur la côte occidentale de l'Inde, revendiquent le titre de « chrétiens de saint Thomas », l'apôtre qui, selon la tradition (voir les Actes de Thomas, du IIIème siècle, conservés en syriaque et en grec), aurait évangélisé leurs ancêtres et dont la tombe est vénérée à Mylapore. C'est eux que les Portugais découvrent en 1498. À la mort du dernier évêque nestorien, l'évêque de Goa, Ménezes, réunit un synode qui décida l'union à Rome (1599). Le jésuite Francisco Roz devint évêque de l’Église syro-malabare. Ultérieurement ce furent les carmes déchaux qui assumèrent cette juridiction. 1662 voit le sacre de Mar Alexandre Parampil, dernier évêque malabar, qui ramène beaucoup de syriens orthodoxes à son Église. Les fidèles dépendirent ainsi des ordinaires latins pendant trois siècles (1599-1896), c'est-à-dire jusqu'à la création de trois vicariats apostoliques confiés au clergé indigène. En 1923 est mise en place la première hiérarchie malabare catholique, avec Ernakulam comme siège métropolitain. Mais ces chrétiens ne sont pas autorisés, même encore de nos jours, à évangéliser le reste de l'Inde, à moins de passer au rite latin. L'Église malabare comprend un archevêché majeur (Ernakulam-Angamaly) et vingt-et-une éparchies en Inde (État du Kerala).
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Les 21 Églises catholiques d'Orient (3)
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Les 21 Églisescatholiquesd'Orient (2)
Les Églises orientales catholiques de tradition antiochienne
3. L'Église maronite, ou Église antiochienne syriaque maronite, tire son nom de saint Maron ou Maroun, ascète qui vécut dans la région de Cyr, en Syrie († 410). Le peuple maronite se considère l'héritier spirituel des moines du monastère de Saint-Maroun, situé sur les rives de l'Oronte, à l'Est de Hama. Il reçut ce nom après le concile de Chalcédoine, dont il fut un ardent défenseur, demeurant fidèle à l’Église de l’Empire et au concile lui-même. En 517 Sévère, patriarche jacobite d'Antioche, fit massacrer 350 moines maronites qui se rendaient en pèlerinage à l'église de Saint-Siméon le Stylite. Entre 631 et 641, après la conquête musulmane les Maronites se réfugient au Liban, et se donnent un patriarche d'Antioche et de tout l'Orient (685) alors que le siège patriarcal d'Antioche était vacant depuis 609. L’invasion des armées de l’empereur Justinien II (684) renforce la cohésion des maronites ainsi que leur particularisme en tant que communauté séparée. Une nouvelle vacance du siège patriarcal amène les évêques liés au monastère de Saint-Maron à élire un patriarche d’Antioche (vers 740), en particulier après que le calife de Damas, Marwan II (744-748), ait reconnu les maronites comme communauté religieuse séparée, dont le chef était aussi compétent pour les affaires séculières. C’est l’époque où les maronites commencèrent à émigrer vers le Liban. En l'absence de documents prouvant le contraire, il faut affirmer qu’ils sont restés toujours, au moins formellement, en communion avec Rome. Et si l’Église maronite a embrassé le monothélisme, elle a rejeté cette erreur une première fois en 1182 devant le légat du patriarche d'Antioche Amaury. L'Église maronite comprend une éparchie patriarcale (Batroun et Sarba) et dix éparchies au Liban (Antélias, Baalbeck, Beyrouth, Deir-El-Ahmar, Jbeil, Jounieh, Saïda, Tripoli du Liban, Tyr, Zahleh), dix en dehors du Liban (Brooklyn, São Paulo, Montréal, Sydney, Buenos Aires, Le Caire, Damas, Lattaquieh, Alep et Chypre), un exarchat à Jérusalem, un vicariat patriarcal au Koweit, trois procures patriarcales (Rome, Paris, Marseille). Un visiteur apostolique pour les Maronites d'Europe du Nord a été créé le 2 juillet 1993. Ailleurs, ce sont les ordinaires latins qui ont la charge des Maronites.
4. L'Église syrienne, ou Église antiochienne syriaque catholique, d’antique tradition, naît au XVIe siècle, quand le patriarche Ignatius Nemetellah, élu en 1557, reconnaît l'autorité de l'évêque de Rome. La tentative d’union de l’Église jacobite à Rome au moment du concile de Florence-Latran en 1444 avait échoué. En 1680, l’Église syrienne est confiée à des vicaires apostoliques. Un siècle plus tard, Mikhaïl III Jaroué, évêque syriaque catholique d'Alep est élu patriarche des syriaques catholiques et orthodoxes (27 janvier 1782). Mais ces derniers se révoltèrent treize jours après et choisirent leur propre patriarche. Le patriarche syriaque catholique réside depuis au Liban, en un lieu qui deviendra le couvent Notre-Dame de la Délivrance à Charfet. L'Église syriaque compte huit éparchies : une au Liban (éparchie patriarcale à Beyrouth), quatre en Syrie (Damas, Homs, Alep et Hassaké-Nassibine), deux en Irak (Bagdad et Mossoul), une en Égypte (Le Caire) et deux exarchats patriarcaux (Jérusalem et Turquie).
5. L'Église syro-malankare catholique. Les chrétiens de saint Thomas qui s’étaient séparés de l’Église syro-malabare au XVIIe siècle pour former l’Église syrienne orthodoxe de l’Inde, cherchent à rétablir la communion avec Rome : quatre tentatives ont lieu au XVIIIe siècle, mais elles échouent. En 1926, un de ses évêques est désigné pour rouvrir les négociations. Les conditions posées étaient, pour les malankares, de conserver leur liturgie et leur hiérarchie en place, pour Rome que le baptême et les ordinations soient prouvés valides. Or l'évêque en question, Mar Ivanios de Bethany, un autre évêque, un prêtre, un diacre et un laïc sont reçus en 1930 dans la communion de l'Église catholique. Toute la branche féminine et une partie de la branche masculine de l’Ordre de l’Imitation du Christ suivirent Mar Ivanios, leur fondateur. Ce dernier est promu chef de l’Église syro-malankare, avec siège à Trivandrum (Kérala). L'Église malankare comprend un siège métropolitain (Trivandrum) et deux éparchies (Tiruvalla et Battery). Depuis 1958, l’ashram de Kurisumala fait revivre le monachisme oriental adapté au mode de vie des ascètes hindous.
(à suivre…) -
Les 21 Églises catholiques d'Orient (4)
Les Églises orientales catholiques de tradition constantinopolitaine
9. L'Église melkite catholique, du nom donné par les monophysites (jacobites et coptes) après la conquête arabe aux chrétiens des patriarcats d’Alexandrie, d’Antioche et de Jérusalem restés fidèles à Chalcédoine et donc à l'empereur byzantin qui avait confirmé ce concile œcuménique (malka en syriaque, malik en arabe veut dire royalistes) ; cette dénomination s’applique à la fraction de cette communauté qui est entrée en communion avec Rome. Les relations de l’Église melkite avec Rome ont traversé trois phases. La période antiochienne est marquée par la communion. La période byzantine est une phase de rupture, la hiérarchie melkite se ralliant aux idées anti-latines des théologiens de langue grecque. La dernière phase est celle de l’intercommunion.
Après que les Ottomans eussent divisé l'Orient en trois wilayat (Damas, Beyrouth et Alep) au XVIe siècle, le gouvernement de Damas s'immiscait fréquemment dans les affaires du patriarche orthodoxe. Le patriarche Ephtimos II négocie alors l'union avec Rome, mais il n'a pas le temps de la conclure. À la mort du patriarche Athanasios III Dabbas, en 1724, l'autorité de son successeur est battue en brèche par le patriarche de Constantinople qui nomme son candidat, appuyé par le Sultan ottoman. D'où une scission, une partie adhérant au patriarche légitime et devenant catholique. La série des patriarches melkites catholiques est ininterrompue depuis Cyrille VI († 1759). De cette date jusqu'en 1830, l'Église melkite souffrit de violentes persécutions de la part des Ottomans. À l'occasion de l'occupation de la Syrie par les Égyptiens, le siège patriarcal fut transféré à Beyrouth (1833). En 1838 le patriarche catholique Maximos III Mazlum obtient que Constantinople reconnaisse l’existence juridique de l’Église et de la nation (millet) melkite. Rome autorisa Maximos III à porter le titre de patriarche d’Alexandrie et de Jérusalem. L'Église melkite catholique comprend vingt éparchies, dont cinq en Syrie (Alep, Bosra-Hauran, Damas, Homs, Lattaquieh), sept au Liban (Beyrouth-Jbeil, Tyr, Baalbeck, Banyas-Césarée de Philippes, Saïda, Tripoli du Liban, Zahleh-Furzol), une à Haïfa, au Caire, à Amman, São Paulo, Mexico, New-York, Montréal et Sydney, un exarchat patriarcal à Jérusalem, au Caire (pour l'Égypte et le Soudan) et au Koweit, et un exarchat apostolique au Venezuela.
10. L'Église ukrainienne catholique développa son identité propre après le schisme de 1054. Objet d'occupations diverses, celle des Polonais au XVe siècle rendit le catholicisme prépondérant, au point que le métropolite de Kiev accepta l'union proposée au concile de Florence (8 janvier 1438-7 août 1445). Moscou rejeta cette union et élut son propre métropolite. L'union de la province métropolitaine de Kiev fut alors formellement proclamée au synode de Brest-Litovsk (1595-1596). Au XVIIIe siècle le Tsar abolira l'union avec Rome en Ukraine orientale et imposera l'orthodoxie aux Ukrainiens catholiques de son Empire ; l’union n’est préservée que dans la partie occidentale de l’Ukraine, rattachée en 1772 à l’Autriche après le premier partage de la Pologne. En 1946, un synode des prêtres ukrainiens catholiques se tient à Lvov pour dissoudre officiellement l'union et intégrer l'Église d'Ukraine à l'Église russe orthodoxe, à la suite de l'annexion de l'Ukraine par l'URSS. Le premier synode plénier de toute la Rus' depuis la persécution s'est tenu en 1992 à Lvov, qui est archevêché majeur. La hiérarchie catholique a pu être reconstituée avec la création de quatre éparchies (20 août 1993) à Koloma-Chernivci des Ukrainiens, Sambir-Drohobych, Ternpil et Zboriv, et d'une administration apostolique dans les Carpates (14 août 1993). La diaspora se trouve principalement en Amérique du Nord, avec cinq éparchies au Canada, quatre aux États-Unis, une au Brésil et une en Argentine. Il en existe également une en Pologne et en Australie, à quoi s'ajoutent des exarchats apostoliques en Allemagne, France, Pologne et Royaume-Uni.
(à suivre…) -
18 juin : la Fête-Dieu
L’Église fête aujourd’hui le corps et le sang du Christ. Lors de la messe, quand le prêtre prononce les mêmes paroles que Jésus, le soir du Jeudi saint au Cénacle, le pain cesse d’être du pain pour devenir vraiment, réellement et substantiellement le corps du Christ, et de même le vin devient son sang. Celui-ci l’a institué au cours du dernier repas qu’il a pris avec ses apôtres, la dernière Cène : « Puis, prenant du pain, il rendit grâces, le rompit et le leur donna, en disant : “Ceci est mon corps, donné pour vous ; faites cela en mémoire de moi.” Il fit de même pour la coupe après le repas, disant : “Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang, versé pour vous.” » (Luc 22, 19-20). C’est le sacrement de l’Eucharistie. La foi catholique affirme qu’après la consécration, le Christ est tout entier présent dans chacune des espèces et dans chacune de leurs parties.
L’Eucharistie, réservée dans le tabernacle pour être portée en Viatique aux malades proches de la mort, est aussi proposée à l’adoration des fidèles dans les saluts du Saint-Sacrement, les bénédictions du Saint-Sacrement, les reposoirs, les congrès eucharistiques…Cette adoration est fondamentale dans la vie d’un fidèle, car elle correspond à ce pour quoi l’homme a été créé.
« Il est émouvant pour moi de voir comment, partout dans l'Église, est en train de se réveiller la joie de l’adoration eucharistique et que ses fruits se manifestent. Au cours de la période de la réforme liturgique la Messe et l'adoration en dehors de celle-ci étaient souvent considérées comme en opposition entre elles : le Pain eucharistique ne nous aurait pas été donné pour être contemplé, mais pour être mangé, selon une objection alors courante. Dans l’expérience de prière de l’Église s’est désormais manifesté le non-sens d'une telle opposition. Augustin avait déjà dit : …nemo autem illam carnem manducat, nisi prius adoraverit ;… peccemus non adorando — « Que personne ne mange cette chair sans auparavant l’adorer;… nous pécherions si nous ne l’adorions pas » (cf. Enarr. in Ps 98, 9 CCL XXXOX 1385). De fait, dans l'Eucharistie nous ne recevons pas simplement une chose quelconque. Celle-ci est la rencontre et l’unification de personnes ; cependant, la personne qui vient à notre rencontre et qui désire s’unir à nous est le Fils de Dieu. Une telle unification ne peut se réaliser que selon la modalité de l’adoration. Recevoir l’Eucharistie signifie adorer Celui que nous recevons. Ce n’est qu’ainsi, et seulement ainsi, que nous devenons une seule chose avec Lui. C'est pourquoi le développement de l’adoration eucharistique, telle qu’elle a pris forme au cours du Moyen-âge, était la conséquence la plus cohérente du mystère eucharistique lui-même : ce n’est que dans l’adoration que peut mûrir un accueil profond et véritable. C’est précisément dans cet acte personnel de rencontre avec le Seigneur que mûrit ensuite également la mission sociale qui est contenue dans l’Eucharistie et qui veut briser les barrières non seulement entre le Seigneur et nous, mais également et surtout les barrières qui nous séparent les uns des autres. »
Benoît XVI, Discours aux membres de la curie romaine, 22 décembre 2005. -
24 juin : Saint-Jean-Baptiste
L’influence de Jean-Baptiste sur Jésus
La figure de saint Jean-Baptiste occupe une place importante dans le Nouveau Testament et, concrètement, dans les Évangiles. Elle a été commentée par la tradition chrétienne la plus ancienne et a pénétré profondément dans la piété populaire, qui célèbre depuis les temps les plus reculés la fête de sa naissance avec une solennité particulière. Ces dernières années, elle est au centre de l’attention de ceux qui étudient le Nouveau Testament et les origines du christianisme et qui se posent la question de savoir ce que nous pouvons connaître des rapports entre Jean-Baptiste et Jésus de Nazareth du point de vue de la critique historique.
Deux types de sources parlent de Jean-Baptiste, les unes chrétiennes, les autres profanes. Les sources chrétiennes sont les quatre Évangiles canoniques et l’évangile gnostique de Thomas. La source profane la plus importante est Flavius Josèphe, qui consacre un long paragraphe de ses Antiquitates Judaicæ 18, 116-119, à gloser le martyre de Jean-Baptiste du fait d’Hérode dans la forteresse de Machéronte (en Pérée). Pour apprécier les influences éventuelles, il peut être utile de considérer ce que nous savons de la vie, de la conduite et du message des deux hommes.
1. Naissance et mort. Jean-Baptiste est contemporain de Jésus, est né certainement un peu avant lui et a commencé sa vie publique aussi avant. Il était d’origine sacerdotale (Luc 1), même s’il n’a pas exercé ses fonctions et si l’on suppose que, par sa conduite et du fait qu’il est resté éloigné du Temple, il s’est montré contraire au comportement du sacerdoce officiel. Il a passé un certain temps au désert de Judée (Luc 1, 80), mais il ne semble pas qu’il ait été en relation avec le groupe de Qumran, étant donné qu’il ne se montre pas aussi radical que lui dans l’accomplissement des préceptes légaux (halakhot). Il est mort condamné par Hérode Antipas (Flavius Josèphe, Ant. 18, 118). Jésus, pour sa part, a passé sa première enfance en Galilée et a été baptisé par Jean dans le Jourdain. Il a appris la mort de Jean-Baptiste et en a toujours loué la figure et la mission prophétique.
2. Comportement. De sa vie et sa conduite, Josèphe dit que c’était « une bonne personne » et que beaucoup « allaient à lui et s’enflammaient en l’écoutant ». Les évangélistes sont plus explicites et mentionnent le lieu où sa vie publique s’est déroulée, la Judée et les rives du Jourdain, sa conduite austère dans l’habillement et la nourriture, son attitude de chef à l’égard de ses disciples et sa fonction de précurseur, quand il découvre en Jésus de Nazareth le vrai Messie. Jésus, en revanche, ne s’est pas distingué extérieurement de ses concitoyens : il ne s’est pas limité à prêcher en un endroit déterminé, il a pris part aux repas de famille, s’est habillé avec naturel et, tout en condamnant l’interprétation littérale de la Loi que faisaient les pharisiens, il a accompli tous les préceptes légaux et s’est rendu au Temple de façon assidue.
3. Message et baptême. Selon Josèphe, Jean-Baptiste « exhortait les Juifs à pratiquer la vertu, la justice les uns envers les autres et la piété envers Dieu, puis à recevoir le baptême ». Les Évangiles ajoutent que son message était un message de pénitence, eschatologique et messianique ; il exhortait à la conversion et enseignait que le jugement de Dieu était imminent : un qui est « plus fort que moi » viendra, qui baptisera dans l’Esprit Saint et le feu. Pour Josèphe, son baptême était « un bain du corps » et signe de propreté de l’âme par la justice. Pour les évangélistes, c’était « un baptême de conversion pour le pardon des péchés » (Marc 1, 15). Jésus ne rejette pas le message de Jean-Baptiste, mais part de lui (Marc 1, 15) pour annoncer le royaume et le salut universel, et il s’identifie au Messie que Jean annonçait, ouvrant ainsi l’horizon eschatologique. Et, surtout, il fait du baptême la source du salut (Marc 16, 16) et la porte pour participer aux dons octroyés aux disciples.
En résumé, il y a eu beaucoup de point de contact entre Jean et Jésus, mais toutes les données connues jusqu’ici mettent en évidence le fait que Jésus de Nazareth a dépassé le schéma vétérotestamentaire de Jean-Baptiste (conversion, attitude éthique, espérance messianique) et présenté l’horizon infini du salut (règne de Dieu, rédemption universelle, révélation définitive).
Santiago Ausín, professeur de la faculté de Théologie de l’Université de Navarre
Original sur le site opusdei.es
Traduit par mes soins -
Comment les Évangiles ont-ils été écrits ?
L’Église affirme sans hésiter que les quatre Évangiles canoniques « transmettent fidèlement ce que Jésus, le Fils de Dieu, vivant parmi les hommes, a fait et enseigné » (concile Vatican II, constitution dogmatique Dei Verbum, « la parole de Dieu », n° 19). Ces quatre Évangiles « ont une origine apostolique. Ce que les apôtres, en effet, sur l’ordre du Christ, ont prêché, par la suite eux-mêmes et des hommes de leur entourage nous l’ont, sous l’inspiration divine de l’Esprit, transmis dans des écrits » (Ibid.). Les écrivains chrétiens de l’Antiquité ont expliqué comment les évangélistes ont réalisé ce travail. Saint Irénée, par exemple, dit que « Matthieu a publié parmi les Hébreux dans leur propre langue une forme écrite d’Évangile, tandis que Pierre et Paul à Rome annonçaient l’Évangile et fondaient l’Église. C’est après leur départ que Marc, le disciple et l’interprète de Pierre, nous a transmis aussi par écrit ce que Pierre avait prêché. Luc, compagnon de Paul, a consigné aussi dans un livre ce que ce dernier avait prêché. Ensuite Jean, le disciple du Seigneur, celui qui avait reposé sur sa poitrine (Jean 13, 23), a publié aussi l’Évangile tandis qu’il habitait Éphèse » (Contre les hérétiques III, 1, 1). Des commentaires très semblables se trouvent chez Papias de Hiérapolis ou Clément d’Alexandrie (voir Eusèbe de Césarée, Histoire ecclésiastique 3, 39, 15 ; 6, 14, 5-7) : les Évangiles ont été écrits par les apôtres (Matthieu et Jean) ou par des disciples des apôtres (Marc et Luc), mais toujours en recueillant la prédication de l’Évangile par les apôtres.
L’exégèse moderne, après une étude très attentive des textes évangéliques, a expliqué en détail ce processus de composition. Le Seigneur Jésus n’a pas envoyé ses disciples écrire mais prêcher l’Évangile. C’est ce que les apôtres et la communauté apostolique ont fait et, pour faciliter la tâche d’évangélisation, ils ont mis par écrit une partie de cet enseignement. Enfin, au moment où les apôtres et ceux de leur génération étaient en train de disparaître, « les auteurs sacrés composèrent les quatre Évangiles, choisissant certains des nombreux éléments transmis soit oralement soit déjà par écrit, rédigeant un résumé des autres, ou les expliquant en fonction de la situation des Églises » (Dei Verbum, n° 19).
Par conséquent, on peut en conclure que les quatre Évangiles sont fidèles à la prédication des apôtres sur Jésus et que la prédication des apôtres sur Jésus est fidèle à ce que Jésus a fait et dit. Par là nous pouvons dire que les Évangiles sont fidèles à Jésus. De fait, les noms que les auteurs anciens donnent à ces textes — « Souvenirs des apôtres », « Commentaires, Paroles sur (du) le Seigneur » (voir saint Justin, Apologie 1, 66) ; Dialogue avec Triphon 100) — vont dans ce sens. Avec les écrits évangéliques, nous avons accès à ce que les apôtres prêchaient au sujet de Jésus.
Vicente Balaguer, professeur à la Faculté de théologie de l’Université de Navarre
Disponible sur le site www.opusdei.es
Traduit par mes soins -
11 juin : la Sainte Trinité
Les chrétiens célèbrent aujourd’hui le mystère central de leur foi : l’existence d’un seul Dieu en trois Personnes. C’est un paradoxe, certes, mais en même temps la réalité la plus élevée. « Il n’y a qu’un seul Dieu et le monothéisme de l’Ancien Testament est fidèlement maintenu. Ce Dieu se manifeste comme le Père qui a un Fils, avec lequel il est en relation dans l’unité d’un même Esprit. Non pas trois dieux, mais un seul Dieu en trois Personnes, auxquelles l’Écriture [la Bible] donne trois noms divins, qui accomplissent, dans cette communion divine, un même salut pour les hommes » (Catéchisme des évêques de France, n° 235).
Dès le début de leur prédication, les apôtres enseigneront que « comme votre vocation vous a tous appelés à une seule espérance, de même il n’y a qu’un seul Corps et un seul Esprit. Il n’y a qu’un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême, un seul Dieu et Père de tous, qui règne au-dessus de tous, par tous et en tous » (Éphésiens 4, 4-6).
Je n’ai pas la prétention de faire ici un cours sur la Trinité, ce qui conduirait trop loin. Je me limiterai à dire qu’en partant de l’Écriture, qui est la Parole de Dieu, « les relations qui unissent le Père, le Fils et l’Esprit dans la réalisation de notre salut révèlent des relations qui les unissent dans leur vie éternelle. Le Père est Père depuis toujours et n’est que Père ; le Fils est éternellement engendré par le Père et de même nature que lui (« consubstantiel »), comme le définissent les conciles de Nicée en 325 et de Constantinople en 381, et comme le dit encore aujourd’hui le Credo. De même l’Esprit n’est pas une créature du Fils : « Il est Seigneur et il donne la vie : avec le Père et le Fils il reçoit même adoration et même gloire, il procède du Père ». […] Pour désigner pareillement le Père, le Fils et l’Esprit qui ne font pas trois dieux, la Tradition de l’Église a élaboré le terme de personneen le distinguant de celui de nature. Chacune des Personnes est constituée par la relation spécifique qui l’unit aux autres. Mais les Personnes s’inscrivent dans l’unité de la même nature divine et ne la multiplient pas. Simplement, chaque Personne a une place et un rôle originaux dans l’éternel mouvement d’échange, de don et de retour qui habite la même nature. Le dogme de la Trinité se résume donc dans la formule : trois Personnes égales et distinctes en une seule nature » (Catéchisme des évêques de France, n° 237).
Dans la préface de la messe, les croyants affirment que, « vraiment, il est juste et il est bon de te rendre gloire, de t’offrir notre action de grâce, toujours et en tout lieu, à toi, Père très saint, Dieu éternel et tout-puissant. Avec ton Fils unique et le saint-Esprit, tu es un seul Dieu, tu es un seul Seigneur, dans la trinité des personnes et l’unité de leur nature. Ce que nous croyons de ta gloire, parce que tu l’as révélé, nous le croyons pareillement, et de ton Fils et du Saint-Esprit ; et quand nous proclamons notre foi au Dieu éternel et véritable, nous adorons en même temps chacune des Personnes, leur unique nature, leur égale majesté ». -
Qui étaient les évangélistes ?
Ce qui est important dans les Évangiles, c’est qu’ils nous transmettent la prédication des apôtres et que les évangélistes ont été des apôtres ou des hommes apostoliques (voir concile Vatican II, constitution dogmatique Dei Verbum, « la Parole de Dieu », n° 19). Ceci est conforme à la tradition : les auteurs des Évangiles sont Matthieu, Jean, Luc et Marc. Les deux premiers figurent dans la liste des apôtres (Matthieu 10, 2-4 et passages parallèles) et les deux autres sont des disciples respectivement de saint Paul et de saint Pierre. Lorsqu’elle fait l’analyse critique de cette tradition, la recherche moderne ne voit pas de gros inconvénients attribuer à Marc et à Luc leur Évangile. En revanche, elle analyse avec un œil plus critique l’autorité de Matthieu et de Jean. Elle affirme d’ordinaire que cette attribution met en évidence la tradition apostolique d’où ces écrits proviennent, non que les auteurs en question aient eux-mêmes écrit ces textes.
Ce qui compte, ce n’est donc pas la personne concrète qui écrit l’Évangile, mais l’autorité apostolique qui se trouvait derrière chacune d’elles. Au milieu du IIème siècle, saint Justin parle des « mémoires des apôtres ou évangiles » (Apología, 1,66, 3) qu’on lisait pendant la réunion liturgique. Ce qui laisse entendre deux choses : l’origine apostolique de ces écrits et le fait qu’on les recueillait pour les lires en public. Un peu plus tard, toujours au IIème siècle, d’autres auteurs disent que les Évangiles apostoliques sont au nombre de quatre et de quatre seulement. Origène, par exemple, écrit : « L’Église a quatre Évangiles, les hérétiques un très grand nombre, parmi lesquels un qui a été écrit selon les Égyptiens, un autre selon les douze apôtres. Basilide a osé écrire un évangile et lui donner son nom (...). Je connais un évangile appelé selon Thomas et un autre selon Matthias ; et nous en lisons beaucoup d’autres » (Hom. I in Luc., PG 13,1802). Nous trouvons des expressions semblables chez saint Irénée, qui ajoute en outre : « Le Verbe artisan de l’univers, qui est assis au-dessus des chérubins et qui maintient tout, une fois manifesté aux hommes, nous a donné l’Évangile à quatre formes, Évangile qui est cependant maintenu par un seul Esprit » (Contre les hérésies, 3, 2, 8-9). Cette expression — Évangile à quatre formes — met en évidence quelque chose d’important, à savoir que l’Évangile est un, mais sa forme quadruple. La même idée est exprimée par le titre des Évangiles : leurs auteurs ne sont pas indiqués, comme d’autres auteurs de l’époque, par le génitif d’origine (« Évangile de… »), mais par le mot kata (« Évangile selon… »). On indique de cette façon que l’Évangile est unique, celui de Jésus-Christ, mais qu’il en est donné témoignage de quatre façons qui proviennent des apôtres et des disciples des apôtres. C’est la pluralité dans l’unité qui est ainsi soulignée.
Vicente Balaguer, professeur à la Faculté de théologie de l’Université de Navarre
Disponible sur le site www.opusdei.es
Traduit par mes soins -
Liberté, liberté chérie… (5)
Liberté et loi morale
La liberté ne devient effective que par la connaissance de la loi naturelle. Mais elle n'est pas adhésion aveugle, prédéterminée — ce qui serait la négation même de la liberté — ni simple consentement. « Dieu nous demande un effort, effort qui est la preuve de notre liberté » (saint Josémaria, Quand le Christ passe, n° 17). L'homme a la propriété, qui le spécifie en tant qu'homme, de pouvoir être véritablement et personnellement la cause de ses actes. Nous nous situons ici au plan de la voluntas ut ratio, car la volonté est « domina sui actus » (saint Thomas d’Aquin, Summa Theologiæ I-II, q. 9, a. 3).
Il n'en découle pas que l'homme puisse être l'auteur de la loi morale : cela équivaudrait à se prendre pour l'auteur de la nature. Il possède « le don très spécial de la liberté » (saint Josémaria, Quand le Christ passe, n° 99) qui le rend maître de ses actes et capable, toujours avec la grâce divine, de façonner son destin éternel.
Mais il est vraiment la cause de ses actes dont l'exécution concourt, parce qu'ils sont posés en conformité avec la loi, à conserver et développer « l'harmonie divine de la création » (Ibid., n° 183). Non pas cause aveugle, nécessaire, mais cause par le jeu combiné de son intelligence et de sa volonté, par un choix qui lui est personnel. « Voilà le degré suprême de dignité chez les hommes : qu'ils se dirigent par eux-mêmes et non par un autre vers le bien » (saint Thomas d’Aquin, Super Epistolas S. Pauli lectura. Ad Romanos, cap. II, lect. III, 217, éd. Marietti, Turin, 1953, p. 38-39 ; cf. Amis de Dieu, n° 27). C'est alors que l'homme « se sent entièrement libre parce qu'il travaille aux choses de son Père » (saint Josémaria, Quand le Christ passe, n° 138) et qu'il assume délibérément le « conditionnement » que comporte la vie chrétienne. D'où cette exclamation joyeuse et optimiste : "Mon joug est la liberté" (saint Josémaria, Chemin de Croix, Paris, 1982, 2e station, point de méditation n° 4). Comme Dante l'a bien subodoré, « Vous qui vivez, vous attribuez au ciel seul toutes les causes, comme s'il entraînait nécessairement tout avec lui. S'il en était ainsi, le libre-arbitre serait détruit en vous (...) Si le monde actuel s'égare, la cause en est en vous » (Dante Alighieri, La Divine comédie. Le Purgatoire, chant XVI, 67-71. 82, trad. Alexandre Masseron, Paris, 1954).
C'est pour cela que l'homme n'a pas seulement à suivre la nature, mais qu'il doit consentir entièrement à l'ordre établi par Dieu, jusque et y compris en ce point précis qu'agir librement, être pour de bon et personnellement cause, est inhérent à sa nature humaine et qu'il ne respecte pas excellemment cet ordre établi tant qu'il n'agit pas en toute liberté. « Dieu a jugé que ses serviteurs seraient meilleurs s'ils le servaient librement... Dieu ne veut pas d'esclaves. Il préfère avoir des enfants libres » (saint Josémaria, Amis de Dieu, n° 33). Or le maximum de liberté se trouve dans la volonté (saint Thomas d’Aquin, In II Sent., d. 25, q. 1, a. 2 ad 4). D'autre part, il ne faut pas oublier que c'est le propre de Dieu Créateur d'agir au fond intime de sa créature, en sorte que celle-ci demeure parfaitement libre. Donc « plus Dieu est le Maître de la volonté de l'homme, plus celui-ci choisit ce qui est meilleur pour lui, c'est-à-dire conforme à sa destinée établie de toute éternité par le Père, grâce à l'Esprit du Christ qui anime son vouloir. Et plus aussi ce chrétien s'humanise vraiment en sa volonté d'homme » (H.-M. Manteau-Bonamy, La Vierge Marie et le Saint-Esprit, 2e éd. augmentée, Paris, 1975, p. 159).
La loi divine ne s'oppose nullement à la liberté. Bien au contraire, puisqu'elle a pour auteur la liberté même. « Le Seigneur nous a octroyé un grand don surnaturel, la grâce divine, et un merveilleux présent humain, la liberté personnelle qui, pour ne pas se corrompre ni se transformer en licence, exige de nous une intégrité et un ferme engagement de refléter dans notre conduite la loi divine, parce que là où est l'Esprit de Dieu, là se trouve la liberté » (saint Josémaria, Quand le Christ passe, n° 184). La loi divine est, bien évidemment, contraire aux tendances désordonnées de la nature humaine, commutata in deterius par le péché originel. Mais elle n'est pas l'adversaire de tout ce qui est authentiquement humain, de tout ce qui construit la société et le monde dans l'harmonie. Comment en irait-il autrement, alors qu'elle préside à ce développement ? Moyennant quoi il n'y a pas, et il ne peut pas y avoir, « d'opposition entre le service de Dieu et le service des hommes ; entre l'exercice des devoirs et des droits civiques et celui des devoirs et des droits religieux ; entre un effort pour construire et perfectionner la cité temporelle et la certitude que ce monde que nous traversons est un chemin qui nous conduit à la patrie céleste » (saint Josémaria, Amis de Dieu, n° 165).
En dernière instance, c'est l'obéissance à la loi, et donc le respect de l'ordre naturel établi par la Sagesse éternelle, qui seuls maintiennent vives la liberté et la joie de la liberté ; et la conviction que rien de ce monde n'est perdu pour l'au-delà : « Où il n'y a pas de liberté, là point de mérite » (St Bernard, Serm. 81 in Cant. 6).
(à suivre…) -
9 juin: le Sacré Cœur
L’Église fête aujourd’hui le Cœur de Jésus-Christ qui a été transpercé sur la Croix par un soldat romain : « Arrivés à Jésus, comme ils virent qu’il était déjà mort, ils ne lui brisèrent pas les jambes, mais un des soldats lui perça le côté avec sa lance, et il en sortit aussitôt du sang et de l’eau. Et celui qui a vu en rend témoignage » (Jean 19, 33-35). Ce soldat est appelé Longin, du grec logchê, « lance », par les Actes de Pilate, un texte apocryphe, c’est-à-dire non reconnu par l’Église comme étant inspiré par Dieu. Il se serait converti le jour de la Pentecôte.
Dans la préface de la messe d’aujourd’hui, l’Église rappelle qu’en laissant jaillir l’eau et le sang, Jésus « fit naître les sacrements de l’Église, pour que tous les hommes, attirés vers son Cœur, viennent puiser la joie aux sources vives du salut ».
La dévotion au Sacré Cœur de Jésus s’est beaucoup répandue à la suite des apparitions du Christ à Marguerite-Marie Alacoque (1647-1690) pour lui demander qu’un culte spécial lui soit rendu pour compenser tous les outrages qu’il reçoit dans l’Eucharistie, le sacrement de sa présence réelle parmi les hommes. La visionnaire était religieuse au monastère de la Visitation (un ordre féminin contemplatif de religieuses, dites de la Visitation de Sainte-Marie, ou Visitandines, fondé par saint François de Sales et sainte Jeanne de Chantal en 1610), à Paray-le-Monial.
Lors de la troisième apparition, en juin 1675, Jésus découvrit son Cœur à Marguerite-Marie en lui disant : « Voilà ce Cœur qui a tant aimé les hommes, qu’il n’a rien épargné jusqu’à s’épuiser et se consommer pour leur témoigner de son amour. Et, pour reconnaissance, je ne reçois de la plupart que des ingratitudes, par leurs irrévérences et leurs sacrilèges, par les froideurs et les mépris qu’ils ont pour moi dans ce sacrement d’amour. »
« La vraie dévotion au Cœur de Jésus consiste à connaître Dieu, à nous connaître nous-mêmes, à fixer notre regard sur Jésus, à recourir à Celui qui nous encourage, nous enseigne et nous guide. Cette dévotion n’est superficielle que pour l’homme qui, faute de n’être pas parvenu à être vraiment humain, n’arrive pas à pénétrer la réalité du Dieu incarné » (saint Josémaria,