L’attitude et l’enseignement de Jésus accordaient à la femme une dignité qui contrastait avec les coutumes de l’époque, et s’est maintenue dans la première communauté chrétienne, comme on peut le voir dans le Livre des Actes des apôtres et dans les lettres du Nouveau Testament.
Bien qu’il existât des différences entre les classes élevées et les classes populaires, ce qui était habituel, c’était que la femme ne joue aucun rôle dans la vie publique. Son domaine était le foyer où elle était soumise à son mari : elle sortait peu de chez elle et quand elle sortait, elle avait le visage couvert et ne s’arrêtait pas à parler à un homme. Le mari pouvait lui donner un libelle de répudiation et la renvoyer. Certes, tout cela ne s’appliquait pas de façon stricte aux femmes qui, par exemple, devaient travailler aux champs. Mais même dans ce cas, elle ne pouvait pas rester seule avec un homme. La différence la plus importante avec l’homme se trouve cependant dans le domaine religieux : la femme est soumise aux interdictions de la Loi, mais est exemptée des préceptes (aller en pèlerinage à Jérusalem, réciter chaque jour le Shema, etc.). Elle n’était pas tenue d’étudier la Loi et les écoles étaient réservées aux garçons. Pareillement, dans la synagogue la femme se trouvait avec les enfants, séparée des hommes par une grille. Elle ne participait pas au banquet pascal et n’était pas mentionnée parmi ceux qui prononçaient la bénédiction après le repas.
Face à cela, nous découvrons dans les Évangiles de nombreux exemples d’une attitude ouverte de Jésus : en plus de nombreuses guérisons de femmes, il prend souvent dans sa prédication l’exemple de la femme, comme celle qui balaye sa maison jusqu’à ce qu’elle trouve la drachme perdue (Luc 15, 8), la veuve qui persévère dans la prière (Luc 18, 3) ou la veuve pauvre et généreuse (Luc 21, 2). Il a corrigé l’interprétation du divorce (Luc 16, 18) et admis que des femmes le suivent. Quant à ceux qui le suivaient, l’attitude de Jésus a été également très ouverte. Jésus avait des disciples sédentaires, pour ainsi dire, qui vivaient chez eux, comme Lazare (Jean11, 1 ; voir Luc 10, 38-39) ou Joseph d’Arimathie (Matthieu 27, 57). De Marie, il est dit qu’« assise aux pieds du Seigneur, elle l’écoutait parler » (Luc 10, 39) comme pour signifier l’attitude du disciple du Seigneur (voir Luc 8, 15.21). l’Évangile parle aussi de la mission itinérante de Jésus et de ses disciples. C’est dans ce contexte qu’il faut entendre Luc 8, 1-3 (voir Matthieu 27, 55-56 ; Marc 15, 40)41) : Jésus « cheminait par villes et bourgs, proclamant et annonçant la Bonne nouvelle du royaume de Dieu. Les Douze étaient avec lui, et aussi quelques femmes qui avaient été délivrées d’esprits mauvais et de maladies : Marie, surnommée Magdaléenne, de qui étaient sortis sept démons ; Jeanne, femme de Chouza, intendant d’Hérode ; Suzanne et plusieurs autres, qui les assistaient de leurs biens. » Un groupe de femmes accompagne donc Jésus et les apôtres dans la prédication du royaume et réalise une tâche de diaconie, de service.
Vicente Balaguer, professeur de la faculté de Théologie de l’Université de Navarre
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Que s'est-il passé au concile de Nicée ?
Le Ier concile de Nicée est le premier concile œcuménique, c’est-à-dire universel en ce que des évêques de toutes les régions où les chrétiens étaient présents y ont participé. Il a eu lieu quand l’Église a pu jouir d’une paix stable et disposer de la liberté pour se réunir ouvertement. Il s’est tenu du 20 mai au 25 juillet 325. Y ont pris part quelques évêques qui portaient sur leur corps les traces des coups qu’ils avaient reçus pour rester fidèles au cours des persécutions, encore très récentes.
L’empereur Constantin, qui n’avait pas encore été baptisé, ménagea la participation des évêques en mettant à leur disposition le service des postes impériales pour leur déplacement et en leur offrant l’hospitalité à Nicée de Bithynie, près de sa résidence de Nicomédie. De fait, il jugea cette réunion très opportune, car, après avoir obtenu la réunification de l’empire à la suite de sa victoire contre Licinius en 324, il désirait aussi voir l’Église unie, alors qu’elle était secouée par la prédication d’Arius, un prêtre qui niait la véritable divinité de Jésus-Christ. Depuis 218 Arius s’était opposé à son évêque Alexandre d’Alexandrie et avait été excommunié par un synode réunissant tous les évêques d’Égypte. Arius s’enfuit et vint à Nicomédie, près de son ami l’évêque Eusèbe.
Au nombre des Pères se trouvaient les personnages ecclésiastiques les plus importants du moment : Osius, évêque de Cordoue qui semble avoir présidé les séances ; Alexandre d’Alexandrie, aidé par Athanase, alors diacre ; Marcel d’Ancyre, Macaire de Jérusalem, Léonce de Césarée de Cappadoce, Eustache d’Antioche et quelques prêtres représentant l’évêque de Rome, empêché d’y assister en raison de son grand âge. Des amis d’Arius ne manquèrent pas : Eusèbe de Césarée, Eusèbe de Nicomédie et quelques autres. Environ trois cents évêques au total étaient présents.
Les partisans d’Arius, qui pouvaient compter avec la sympathie de l’empereur Constantin, pensaient qu’une fois qu’ils auraient exposé leur point de vue l’assemblée leur donnerait raison. Cependant Eusèbe de Nicomédie prit la parole pour dire que Jésus-Christ n’était qu’une créature, bien qu’excellente et très éminente, et qu’il n’était pas de nature divine. L’immense majorité des assistants remarqua aussitôt que cette doctrine trahissait la foi reçue des apôtres. Pour éviter une confusion aussi grave, les Pères conciliaires décidèrent de rédiger, sur la base du credo baptismal de l’Église de Césarée, un symbole de la foi qui reflétât de façon synthétique et claire la confession authentique de la foi reçue et admise par les chrétiens depuis les origines. Il y est dit que Jésus-Christ est « de la substance du Père, Dieu de Dieu, Lumière de Lumière, vrai Dieu du vrai Dieu, engendré non pas créé, homoousios tou Patrou (consubstantiel au Père) ». Tous les Pères conciliaires, hormis deux évêques, ratifièrent ce credo, le symbole de Nicée, le 19 juin 325.
En plus de cette question fondamentale, le concile de Nicée fixa la célébration de la Pâques au premier dimanche suivant la première pleine lune du printemps, selon la pratique habituelle dans l’Église de Rome et de beaucoup d’autres Églises. Des questions disciplinaires de moindre importance, relatives au fonctionnement de l’Église, furent également traitées.
Pour ce qui concerne le sujet le plus important, la crise arienne, Eusèbe de Nicomédie réussit, avec l’aide de Constantin, à revenir sur son siège épiscopal, et l’empereur lui-même ordonna à l’évêque de Constantinople d’admettre Arius à la communion. Entre-temps, après la mort d’Alexandre, Athanase avait accédé à l’épiscopat à Alexandrie. Il fut une des principales figures de l’Église tout au long du IVème siècle, défendant la foi de Nicée avec une grande hauteur intellectuelle, ce qui lui valut d’être envoyé en exil par l’empereur.
L’historien Eusèbe de Césarée, proche des thèses ariennes, exagère dans ses écrits l’influence de Constantin au concile de Nicée. Si nous ne disposions que de cette source, nous pourrions penser que l’empereur, en plus de prononcer quelques mots de bienvenue au début des sessions, a joué le premier rôle pour réconcilier les adversaires et restaurer la concorde, s’imposant aussi dans des questions doctrinales par-dessus les évêques qui participaient au concile. Il s’agit d’une version biaisée de la réalité.
Si nous tenons compte de toutes les sources disponibles, nous pouvons certainement dire que Constantin a rendu possible la tenue du concile de Nicée et a exercé une influence sur la réalité de sa tenue en lui donnant son appui. Cependant, l’étude des documents montre que l’empereur n’a pas eu d’influence sur la formulation de la foi faite dans le credo : il n’avait pas la capacité théologique pour dominer les questions débattues, mais surtout les formules approuvées ne coïncidaient pas avec ses inclinations personnelles qui allaient plutôt dans le sens de l’arianisme, c’est-à-dire de considérer Jésus-Christ comme n’étant pas Dieu, mais une créature éminente.
Francisco Varo, doyen de la faculté de théologie de l’Université de Navarre
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Jésus d’après les sources romaines et juives
Les premières mentions de Jésus dans des documents littéraires en dehors des écrits chrétiens se trouvent chez des écrivains grecs et romains qui ont vécu dans la deuxième moitié du Ier siècle ou la première moitié du IIème siècle, très près par conséquent des événements.
Le texte le plus ancien qui mentionne Jésus, bien que de façon implicite, a été écrit par un philosophe stoïcien originaire de Samosate en Syrie, appelé Mara bar Sarapion, vers l’année 73. Il parle de Jésus comme d’un « roi sage » des Juifs et dit qu’il a promulgué « de nouvelles lois », faisant peut-être allusion aux antithèses du Sermon sur la Montagne (voir Matthieu 5, 21-48), et qu’il n’a servi de rien aux Juifs de le mettre à mort.
La mention explicite de Jésus la plus ancienne et la plus célèbre est celle de l’historien Flavius Josèphe (Antiquitates iudaicæ 18, 63-64), à la fin du Ier siècle, connu aussi sous le nom de Testimonium Flavianum. Ce texte, qui a été conservé dans tous les manuscrits grecs de l’œuvre de Josèphe, en vient à insinuer qu’il pourrait s’agir du Messie, moyennant quoi nombre d’auteurs pensent qu’il s’agit d’une interpolation des copistes médiévaux. De nos jours, les chercheurs pensent que les mots originaux de Josèphe devaient être très similaires à ceux qui ont été conservés dans une version arabe citée par Agapios, évêque de Hiérapolis, au Xème siècle, d’où les interpolations présumées sont absentes. Ce texte est le suivant : « En ce temps-là, un sage appelé Jésus eut une bonne conduite et était connu pour être vertueux. Il a eu pour disciples de nombreuses personnes des Juifs et d’autres peuples. Pilate l’a condamné à être crucifié et à mourir. Mais ceux qui étaient devenus ses disciples n’ont pas abandonné leur poste et ont raconté qu’il leur était apparu trois jours après la crucifixion et qu’il était vivant, et qu’il pouvait donc être appelé le Messie dont les prophètes avaient dit des choses merveilleuses. »
Parmi les écrits romains du IIème siècle (Pline le Jeune, Epistolarum ad Traianum Imperatorem cum eiusdem Responsis liber 10, 96 ; Tacite, Annales 14, 44 ; Suétone, Vie de Claude 25, 4), nous trouvons des allusions à la personne de Jésus et à l’action de ceux qui l’ont suivi.
Dans les sources juives, le Talmud en particulier, il est fait à plusieurs reprises allusion à Jésus et à certaines choses qui se disaient de lui, ce qui permet de corroborer certains détails historiques à partir de sources qui ne peuvent être suspectées d’avoir été manipulées par des chrétiens. Un chercheur juif, Joseph Klausner, résume ainsi les conclusions dignes de confiance qui peuvent se déduire des énoncés talmudiques sur Jésus : « Il y a des énoncés dignes de confiance comme quoi son nom était Yeshua (Yeshu) de Nazareth, qu’il a « pratiqué la sorcellerie » (c’est-à-dire qu’il a réalisé des miracles comme cela était courant à l’époque) et la séduction, et qu’il conduisait Israël sur une mauvaise voie ; qu’il s’est moqué des paroles des sages et qu’il a commenté l’Écriture de la même façon que les pharisiens ; qu’il a eu cinq disciples ; qu’il a dit qu’il ne venait nullement abroger la Loi ni demander quoi que ce soit ; qu’il a été suspendu à un bois (crucifié) en tant que faux maître et séducteur, la veille de la Pâque (qui tombait un jour de sabbat) ; et que ses disciples soignaient des maladies en son nom » (J. Klausner, Jésus de Nazareth). Le résumé qu’il fait, avec ses incises, exigerait des précisions du point de vue historique, mais est suffisamment expressif de ce que ces sources peuvent dire, qui n’est pas tout, mais n’est pas peu de chose non plus. Confrontant ces données avec celles qui proviennent des auteurs romains, il est donc possible d’assurer avec une certitude historique que Jésus existé et même de connaître certaines des données les plus importantes de sa vie.
Francisco Varo, doyen de la faculté de Théologie de l’Université de Navarre
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Qu'est-ce que l'Édit de Milan ?
Au début du IVème siècle, les chrétiens furent de nouveau durement persécutés. L’empereur Dioclétien, et Galère avec lui, lancèrent en 303 ce qui est connu comme la « grande persécution », pour tenter de restaurer l’unité de l’État, menacée à leur avis par la croissance continuelle du christianisme. Ils ordonnèrent, entre autres, de démolir les églises des chrétiens, de brûler les exemplaires de la Bible, de mettre à mort les autorités ecclésiastiques, de priver tous les chrétiens de charges publiques et de droits civiques, d’offrir des sacrifices aux dieux sous peine de mort, etc. Vu l’inefficacité de ces mesures pour venir à bout du christianisme, Galère, pour des motifs de clémence et par opportunité politique, promulgua le 30 avril 311 un décret d’indulgence qui mettait fin aux persécutions antichrétiennes. Les chrétiens se voient reconnaître un existence légale et la liberté de célébrer leurs réunions et de construire des temples.
Entre-temps, Constantin avait été élu empereur en Occident. Après avoir battu Maxence en 312, il se réunit en février de l’année suivante avec l’empereur d’Orient à Milan. Parmi les sujets abordés, ils parlèrent des chrétiens et se mirent d’accord pour publier de nouvelles dispositions en leur faveur. Le résultat de cette rencontre est ce qui est connu sous le nom d’Édit de Milan, même s’il n’existe probablement pas d’édit promulgué à Milan par les deux empereurs. Ce sur quoi ils se mirent d’accord est connu par un édit publié par Licinius pour la partie orientale de l’empire. Le texte nous est parvenu par une lettre écrite en 313 aux gouverneurs des provinces, que citent Eusèbe de Césarée (Histoire ecclésiastique 10, 5) et Lactance (De mortibus persecutorum 48). La première partie pose le principe de liberté de religion pour tous les citoyens et, par suite, reconnaît explicitement aux chrétiens le droit de jouir de cette liberté. L’édit permet de pratiquer sa religion non seulement aux chrétiens, mais à tous, quel que soit leur culte. La seconde partie décidée restituer aux chrétiens leurs anciens lieux de réunion et de culte, ainsi que d’autres propriétés, qui leur avaient été confisqués par les autorités romaines et avaient été vendues au cours de la dernière persécution.
Loin d’accorder au christianisme une place prépondérante, l’édit semble plutôt chercher à obtenir la bienveillance de la divinité sous toutes les formes sous lesquelles elle se présentait, en accord avec le syncrétisme que Constantin pratiquait alors, lui qui, tout en favorisant l’Église, continua pendant un certain temps de rendre un culte au Soleil invaincu. En tout état de cause, le paganisme cessa d’être la religion officielle de l’empire et l’édit permit aux chrétiens de jouir des mêmes droits que les autres citoyens. À partir de ce moment-là, l’Église devint une religion licite et reçut une reconnaissance juridique de la part de l’empire, ce qui permit une croissance rapide.
Juan Chapa, professeur à la Faculté de théologie de l’Université de Navarre
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Quelles étaient les affinités politiques de Jésus ?
Jésus a été accusé auprès de l’autorité romaine de promouvoir une révolte politique (voir Luc 23, 2). Pendant que le procurateur Pilate délibérait, il a fait l’objet de pressions pour qu’il condamne Jésus au motif suivant : « Si c’est celui-là que tu libères, tu n’es pas ami de César : quiconque se fait roi se déclare contre César » (Jean 19, 12). C’est pourquoi dans le titre de la croix qui indiquait le motif de la condamnation, il est écrit : « Jésus de Nazareth, roi des Juifs. »
Ses accusateurs ont pris pour prétexte la prédication de Jésus au sujet du royaume de Dieu, un royaume de justice, d’amour et de paix, pour le présenter comme un adversaire politique qui pourrait finir par poser des problèmes à Rome. Mais Jésus n’a pas participé directement à la politique et n’a pas pris parti en faveur d’aucune des factions ou des tendances réunissant les opinions ou l’action politique de ceux qui vivaient alors en Galilée ou en Judée.
Cela ne veut pas dire que Jésus se désintéressait des questions importantes dans la vie sociale de son temps. De fait, l’attention qu’il portait aux malades, aux pauvres et aux nécessiteux n’est pas passée inaperçue. Il a prêché la justice et, par-dessus tout, l’amour du prochain sans distinction.
Quand il entre à Jérusalem pour participer à la fête de la Pâque, la foule l’acclame comme le Messie en criant sur son passage : « Hosanna au fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur. Hosanna au plus haut des cieux ! (Matthieu 21, 9). Cependant Jésus ne répondait pas aux attentes politiques selon lesquelles le peuple s’imaginait le Messie : il n’était pas un chef guerrier venant changer par les armes la situation dans laquelle ils se trouvaient, ni un révolutionnaire incitant à se soulever contre le pouvoir romain.
Le messianisme de Jésus ne se comprend qu’à la lumière des cantiques du Serviteur souffrant prophétisés par Isaïe (Isaïe 52, 13-53, 12), qui s’offre à la mort pour la rédemption de beaucoup. C’est ainsi que les premiers chrétiens l’ont clairement compris en réfléchissant, mus par l’Esprit Saint, sur ce qui s’était passé : « Le Christ lui-même a souffert pour vous, vous laissant un modèle afin que vous suiviez ses traces ; lui qui n’a pas commis le péché et dont la bouche n’a pas proféré de mensonge ; lui qui subissait les outrages sans riposter ; qui endurait la souffrance sans faire de menaces, s’en remettant à celui qui juge en toute justice ; qui a lui-même porté nos péchés en son corps, sur le bois, afin qu’étant mort à nos péchés nous vivions pour la justice ; dont les meurtrissures nous ont guéris. Car vous étiez comme des brebis errantes ; mais à présent vous êtes revenus au pasteur et au gardien de vos âmes » (1 Pierre 2, 5-9).
Certaines biographies récentes de Jésus font remarquer, à propos de son attitude face à la politique du moment, la diversité des hommes qu’il a choisis comme apôtres. On cite d’ordinaire Simon, appelé le zélote (voir Luc 6, 15), qui, comme son surnom l’indique, devait être un nationaliste radical, engagé dans la lutte pour l’indépendance du peuple face aux Romains. Certains experts des langues de la région signalent aussi Judas Iscariote dont le surnom iskariot semble être la transcription populaire grecque du mot latin sicarius, ce qui en ferait un sympathisant du groupe le plus extrémiste et violent du nationalisme juif. En revanche, Matthieu était collecteur d’impôts pour l’autorité romaine, « publicain » ou, ce qui était alors considéré comme l’équivalent, collaborateur avec le pouvoir politique établi par Rome. D’autres noms, comme Philippe, marquent la provenance du monde hellénique qui était très établi en Galilée.
Ces données peuvent présenter des détails discutables ou associer certains de ces hommes à des attitudes politiques qui n’ont pris de l’importance que quelques décennies plus tard, mais en tout état de cause elles montrent bien que dans le groupe des Douze se trouvaient des gens très différents les uns des autres, chacun avec ses opinions et ses prises de positions, qui avaient été appelés à une tâche, celle de Jésus, qui transcendait leur filiation politique et leur condition sociale.
Francisco Varo, doyen de la faculté de théologie de l’Université de Navarre
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Coment expliquer la Résurrection de Jésus ?
La résurrection du Christ est un événement réel qui a eu des manifestations historiquement vérifiées. Les apôtres ont rendu témoignage de ce qu’ils ont vu et entendu. Vers 57, saint Paul écrit aux Corinthiens : « Je vous ai, en effet, transmis tout d’abord ce que moi-même j’avais reçu : quel le Christ est mort pour nos péchés, conformément aux Écritures ; qu’il a été mis au tombeau et qu’il est ressuscité le troisième jour, conformément aux Écritures ; et qu’il est apparu à Céphas, puis aux Douze » (1 Corinthiens 15, 3-5).
Quand quelqu’un s’approche de nos jours de ces faits pour y chercher avec le plus d’objectivité possible la vérité de ce qui s’est produit, une question peut se présenter à son esprit : S’agit-il d’une manipulation de la réalité qui a eu un écho extraordinaire dans l’histoire humaine, ou d’un fait réel qui continue d’être surprenant et inattendu aujourd’hui comme pour les disciples stupéfaits à l’époque ?
Il n’est possible de trouver une réponse raisonnable à cette question qu’en étudiant ce que pouvaient être les croyances de ces hommes au sujet de la vie après la mort, pour se rendre compte si l’idée d’une résurrection comme celle qu’ils racontent est quelque chose de logique dans leurs schémas mentaux.
D’entrée de jeu, dans le monde grec on trouve des références à une vie après la mort, mais avec des caractéristiques singulières. L’Hadès, motif récurent dès les poèmes homériques, est le domicile de la mort, un monde d’ombres qui est comme un vague souvenir de la demeure des vivants. Mais Homère n’a jamais imaginé qu’un retour de l’Hadès soit possible dans la réalité. Dans une perspective différente, Platon a spéculé sur la réincarnation, mais n’a pas pensé à la revitalisation du corps, une fois mort, comme à quelque chose de réel. C’est-à-dire que, même s’il était parfois question d’une vie après la mort, l’idée de résurrection ne passait jamais par la tête, c’est-à-dire l’idée d’un retour à la vie corporelle dans le monde présent d’un individu quelconque.
Dans le judaïsme, la situation était en partie distincte et en partie commune. Le shéol dont parlent l’Ancien Testament et d’autres textes juifs anciens n’est pas très différent de l’Hadès homérique. Les gens y sont comme endormis. Mais, à la différence de la conception grecque, des portes sont ouvertes sur l’espérance. Le Seigneur est l’unique Dieu, aussi bien des vivants que des morts, avec un pouvoir aussi bien sur le monde d’ici-bas que sur le shéol. Un triomphe sur la mort est possible. Dans la tradition juive, d’aucuns manifestent une croyance en une certaine résurrection. L’on attend aussi la venue du Messie. Mais les deux événements ne semblent pas liés. Pour n’importe quel Juif contemporain de Jésus, il s’agit, au moins de prime abord, de deux questions théologiques qui se situent dans des domaines très distincts l’un de l’autre. On s’attend à ce que le Messie batte les ennemis du Seigneur, rétablisse dans toute sa splendeur et sa pureté le culte du Temple, établisse la domination du Seigneur sur le monde, mais on ne pense jamais qu’il ressuscitera après sa mort : c’est quelque chose qui, d’ordinaire, ne venait jamais à l’idée d’un Juif pieux ou instruit.
Dérober son corps ou inventer le faux bruit comme quoi il est ressuscité avec son corps, comme argument pour prouver qu’il était le Messie, est impensable. Le jour de la Pentecôte, selon les Actes des apôtres, Pierre affirme que « Dieu l’a ressuscité, l’affranchissant des douloureux la mort », concluant : « Que toute la maison d’Israël sache avec certitude que Dieu a fait Seigneur et Messie ce Jésus que vous avez crucifié » (Actes 2, 24.36).
L’explication de semblables affirmations est que les apôtres avaient été les témoins de quelque chose qu’ils n’avaient jamais pu imaginer et que, malgré leur perplexité et les moqueries qu’ils pensaient à juste titre que cela allait provoquer, ils se voyaient dans l’obligation d’en rendre témoignage.
Francisco Varo, doyen de la faculté de théologie de l’Université de Navarre
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Peut-on nier l’existence historique de Jésus ?
Actuellement, les analyses historiques les plus rigoureuses sont d’accord pour affirmer en toute certitude — y compris en faisant totalement abstraction de la foi et du recours aux sources historiques chrétiennes pour éviter toute méfiance éventuelle — que Jésus de Nazareth a existé, a vécu dans la première moitié du Ier siècle, était juif, a passé la majeure partie de sa vie en Galilée, a formé un groupe de disciples qui l’ont suivi, a suscité de fortes adhésions et espérances par ce qu’il disait et par les faits admirables qu’il réalisait, a été au moins une fois en Judée et à Jérusalem, à l’occasion de la fête de la Pâque, a été regardé avec méfiance par certains membres du sanhédrin et avec suspicion par l’autorité romaine, moyennant quoi il a fini par être condamné à la peine capitale par le procureur romain de Judée, Ponce Pilate, est mort cloué sur une croix. Une fois mort, son corps a été déposé dans un tombeau, mais au bout de quelques jours son cadavre ne s’y trouvait plus.
Le développement contemporain de la recherche historique permet d’établir ces faits comme étant prouvés, ce qui n’est pas peu de chose concernant un personnage d’il y a vingt siècles. Il n’existe pas d’évidence rationnelle permettant d’assurer avec plus de certitude l’existence de personnages tels qu’Homère, Socrate ou Périclès, pour ne citer que quelques-uns des plus connus, que celles apportées par les preuves de l’existence de Jésus. Et même les données objectives, vérifiables de façon critique, que nous possédons sur ces personnages sont presque toujours des détails.
Le cas de Jésus est différent, non seulement en raison de la trace profonde qu’il a laissée, mais aussi parce que les informations fournies à son sujet par les sources historiques dessinent une personnalité et soulignent des faits qui vont au-delà de l’imaginable et de ce que peut être disposé à accepter quelqu’un qui pense qu’il n’existe rien au-delà du visible et de l’expérimentable. Les données invitent à penser que Jésus était le Messie qui devait venir gouverner son peuple comme un nouveau David et, plus encore, que Jésus était le Fils de Dieu fait homme.
Pour accueillir vraiment cette invitation, il faut compter sur l’aide divine, gratuite, qui donne une splendeur à l’intelligence et la rend capable de percevoir dans toute sa profondeur la réalité dans laquelle elle vit. Il s’agit d’une lumière qui ne défigure pas cette réalité, mais permet de la capter avec toutes ses nuances réelles, dont beaucoup échappent au regard ordinaire. C’est la lumière de la foi.
Francisco Varo, doyen de la faculté de Théologie de l’Université de Navarre
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Que savons-nous réellement de Jésus ?
Nous possédons sur Jésus de Nazareth des informations plus abondantes et meilleurs que sur la plupart des personnages de son temps. Nous disposons de tout ce que les témoins de sa vie et de sa mort nous ont transmis : traditions orales et écrites sur sa personne, parmi lesquelles se détachent les quatre Évangiles, qui ont été transmises dans la réalité de la communauté de foi vivante qu’il a établie et qui continue jusqu’à nos jours. Cette communauté est l’Église, composée de millions de personnes qui suivent Jésus au long de l’histoire, qui l’ont connu par les données que les premiers disciples lui ont transmis de façon ininterrompue. Les données qui figurent dans les évangiles apocryphes et d’autres références extra-bibliques n’apportent rien de substantiel à l’information fournie par les Évangiles canoniques, tels qu’ils ont été transmis par l’Église.
Jusqu’aux Lumières, croyants et non croyants étaient persuadés que ce que nous pouvions connaître de Jésus était contenu dans les Évangiles. Néanmoins, s’agissant de récits écrits à partir de la foi, des historiens du XIXème siècle ont mis en doute l’objectivité de leur contenu. Pour ces savants, les récits évangéliques étaient peu crédibles parce qu’ils ne contenaient pas ce que Jésus a fait et dit, mais ce que croyaient ceux qui ont suivi Jésus quelques années après sa mort. La conséquence a été que jusqu’au milieu du XXème siècle on a mis en doute la véracité des Évangiles et on en est venu à affirmer que « nous ne pouvons savoir presque rien » (Bultmann) de Jésus.
Aujourd’hui, avec le développement de la science historique, les progrès de l’archéologie et notre meilleure connaissance des sources anciennes, nous pouvons affirmer avec un spécialiste connu du monde juif du Ier siècle après Jésus-Christ, qui ne peut pas être accusé de conservatisme, que « nous pouvons savoir beaucoup de Jésus » (Sanders). Par exemple, cet auteur indique « huit faits indiscutables » du point de vue historique sur la vie de Jésus et les origines du christianisme : 1) Jésus a été baptisé par Jean-Baptiste ; 2) c’était un Galiléen qui a prêché et réalisé des miracles ; 3) il a appelé des disciples et a dit qu’ils étaient au nombre de douze ; 4) il a limité son activité à Israël ; 5) il a maintenu une controverse sur le rôle du Temple ; 6) il a été crucifié en dehors de Jérusalem par les autorités romaines ; 7) après la mort de Jésus, ses disciples ont continué de former un mouvement identifiable ; 8) certains Juifs au moins ont persécutés certains groupes du nouveau mouvement (Galates 1, 13.22 ; Philippiens 3, 6) et, à ce qu’il semble, cette persécution a duré au minimum jusqu’à la fin du ministère de Paul (2 Corinthiens 11, 24 ; Galates 5, 11 ; 6, 12 ; voir Matthieu 23, 34 ; 10, 17).
À partir de cette base minimale sur laquelle les historiens sont d’accord, on peut déterminer que les autres données contenues dans les Évangiles sont dignes de foi du point de vue historique. L’application des critères d’historicité à ces données permet d’établir le degré de cohérence et de probabilité des affirmations évangéliques, et que ce que ces récits contiennent est substantiellement certain.
Enfin, il convient de rappeler que ce que nous savons de Jésus est fiable et crédible parce que les témoins sont dignes de foi et parce que la tradition est critique envers elle-même. En outre, ce que la tradition nous transmet résiste à l’analyse de la critique historique. Il est certain que seule une partie de tout ce qui nous a été transmis peut être démontrée par les méthodes utilisées par les historiens. Cependant, cela ne veut pas dire que ce qui n’est pas démontrable par ces méthodes ne s’est pas produit,mais seulement que nous pouvons apporter des données sur sa moindre ou plus grande probabilité. N’oublions pas en outre que la probabilité n’est pas déterminante. Il existe des faits très peu probables qui se sont historiquement produits. Ce qui est certainement vrai, c’est que les données évangéliques sont raisonnables et cohérentes avec les données démontrables. En tout état de cause, c’est la tradition de l’Église, au sein de laquelle ces écrits sont nés, qui nous donne des garanties de sa fiabilité et nous dit comment les interpréter.
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Liberté, liberté chérie… (fin)
Liberté et unité de vie
L'homme libre ne se laisse pas détourner de la finalité essentielle de sa nature. Il intègre chacune des composantes de son être dans le plan divin et collabore ainsi de toutes ses forces à co-racheter avec le Christ. Parfaitement conscient de sa vocation à la plénitude de la vie chrétienne, il discerne à quel point sa vocation humaine et sa vocation surnaturelle constituent un tout qu'il est convié à couler dans une « unité de vie » (saint Josémaria, Amis de Dieu, n° 165) compacte. Il faut « aimer le monde passionnément », comme l'indique le titre d'une homélie du fondateur de l’Opus Dei (cf. Entretiens avec Mgr Escriva, n° 111-123), parce que « votre vocation humaine est une partie, et une partie importante, de votre vocation divine » (saint Josémaria, Quand le Christ passe, n° 46). L'on infère de cette puissante assertion que « notre époque a besoin qu'on restitue à la matière et aux situations qui semblent les plus banales, leur sens noble et originel, qu'on les mette au service du Royaume de Dieu, qu'on les spiritualise, en en faisant le moyen et l'occasion de notre rencontre continuelle avec Jésus-Christ » (Ibid., n° 114).
La vie courante est donc le théâtre où l'homme conquiert sa liberté et où il la met en acte, c'est-à-dire où sa volonté acquiert un habitus, ou qualité stable par laquelle l'être se perfectionne. L'homme s'attache et se livre à Dieu dans un épanouissement sans cesse grandissant qui lui vient de l'adéquation à la loi morale par le truchement de la réponse à la grâce. « La liberté et le don de soi ne se contredisent pas ; ils se soutiennent mutuellement. On ne donne sa liberté que par amour ; je ne conçois pas d'autre type de détachement » (saint Josémaria, Amis de Dieu, n° 31).
C'est ainsi que l'homme vit le plus intensément, s'auto-réalise au maximum, transforme avec vivacité sa vocation humaine — familiale, professionnelle, scientifique, politique, culturelle, etc. — en une authentique vocation divine. S'ouvrent alors devant lui « les chemins divins de la terre » (Ibid., n° 314). Il y déchiffre que Dieu s'intéresse à ce qui constitue « son monde », avec ses projets, avec son amour, avec son travail (cf. D. Le Tourneau, « Le travail comme caractéristique de la sécularité des laïcs. Pistes pour une réflexion », Studium Legionensis [1988]). Un rapport simple, filial et confiant se noue avec l'Absolu, empreint de cette liberté dont les enfants font preuve à l'égard de leurs parents. L'exécution fidèle de sa vocation dans les moindres incidences de son existence lui font savourer le gaudium cum pace (cf. saint Josémaria, Quand le Christ passe, n° 9), la paix et la joie qui l'acheminent à la volonté de ne pas dévier du chemin de Vie : « Nous nous savons libres; nous élevant comme dans un chant d'amour - épithalame d'une âme ardente - qui nous pousse à désirer ne pas nous écarter de Dieu » (saint Josémaria, Amis de Dieu, n° 297). Cette ambition de la sainteté, de la « bonne divinisation » (saint Josémaria, Quand le Christ passe, n° 98) doit s'affirmer et s'affermir tout au long de la vie, dans un crescendo irrésistible d'amour de Dieu, en commençant et en recommençant sans cesse : « Afin de persévérer à la suite de Jésus, il faut une liberté continuelle, un vouloir continuel, un exercice continuel de sa propre liberté » (saint Josémaria, Forge, n° 819) ; elle fait brûler d'une impatience volcanique de contempler Dieu face à face. Vultum tuum, Domine, requiram ! (Psaume 27, 8), Seigneur, je cherche ton visage, répétait Mgr Escriva sur le tard de sa vie (cf. F. Gondrand, Au pas de Dieu. Josémaria Escriva de Balaguer fondateur de l'Opus Dei, Paris, 1982, p. 312).
« Je me plais à parler de l'aventure de la liberté, car c'est ainsi que se déroule votre vie et la mienne. Librement — comme des enfants et, pardonnez-moi si j'insiste, non comme des esclaves — nous suivons le sentier que le Seigneur a tracé pour chacun de nous. Nous savourons cette facilité de mouvement comme un don de Dieu. Librement, sans aucune contrainte, parce que telle est ma volonté, je me décide pour Dieu. Et je m'engage à servir, à transformer mon existence en un don aux autres, par amour de mon Seigneur Jésus » (saint Josémaria, Amis de Dieu, n° 35). Et en dernier ressort cette libre élection émane de « la liberté des enfants de Dieu, que Jésus-Christ nous a gagnée en mourant sur le bois de la croix » (Ibid., n° 297).
(fin)
Dominique LE TOURNEAU
(cet article est paru dans Theologica XXII-XXIII [1991], p. 3-14) -
Le Graal
Qu’est-ce que le saint Graal ? Quels sont ses rapports avec le saint Calice ?
Étymologiquement, le mot graal vient du latin tardif gradalis ou gratalis, qui dérive du latin classique crater, vase. Dans les livres de chevalerie du Moyen Âge il est présenté comme étant le récipient ou la coupe dans lequel Jésus a consacré son Sang au cours de la dernière Cène et que Joseph d’Arimathie a utilisé ensuite pour recueillir le sang et l’eau qui ont coulé quand il a lavé le corps de Jésus. Des années plus tard, selon ces livres, Joseph l’emporta avec lui aux îles britanniques (voir « Qui était Joseph d’Arimathie ? ») et fonda une communauté de gardiens de la relique, qui devait être liée plus tard aux Templiers. Il est probable que cette légende est née au pays de Gales et qu’elle s’inspire de sources anciennes latinisées, comme ce peut être le cas des Actes de Pilate, un ouvrage apocryphe du Vème siècle. Avec la saga celte de Perceval ou Parsifal, liée au cycle du roi Arthur et développée dans des ouvrages tels que Le conte du Graal, de Chrétien de Troyes, Parcival, de Wolfram von Eschenbach, ou Le morte Darthur, de Thomas Malory, la légende s’enrichit et se répand. Le Graal devient une pierre précieuse qui, gardée pendant un certain temps par des anges, a été confiée à la garde de chevaliers de l’ordre du saint Graal et de leur chef, le roi du Graal. Tous les ans, le Vendredi saint, sous une colombe du ciel et après avoir déposé un cachet sur la pierre, elle renouvelle sa vertu et sa force mystérieuse, qui communique une jeunesse perpétuelle et peut combler tout désir de manger et de boire. De temps à autre, des inscriptions sur la pierre révèlent le nom de ceux qui sont appelés au bonheur éternel dans la ville du Graal, au Mont sauvage.
Par sa thématique, cette légende est en rapport avec le calice que Jésus utilisé lors de la dernière Cène et sur lequel existent diverses traditions anciennes. Elles sont fondamentalement au nombre de trois. Selon la plus ancienne, du VIIème siècle, un pèlerin anglo-saxon affirme avoir vu et touché dans l’église du Saint-Sépulcre, à Jérusalem, le calice que Jésus a utilisé. Il était en argent et avait deux anses visibles. Une seconde tradition dit que ce calice est celui qui est conservé dans l’église San Lorenzo de Gênes. On l’appelle le Sacro catino. Il s’agit d’un verre de couleur verte semblable à une assiette, qui aurait été apporté à Gênes par les croisés au XIIèmesiècle. Selon une troisième tradition, le calice de la dernière Cène est celui qui est conservé dans la cathédrale de Valence, en Espagne, où il est vénéré comme le saint Calice. Il s’agit d’une coupe en calcédoine de couleur très foncée, qui aurait été apportée par saint Pierre à Rome et utilisée dans cette ville par ses successeurs, jusqu’à ce qu’elle soit remise, au IIIème siècle, à cause des persécutions, à la garde de saint Laurent, qui l’aurait apportée à Huesca. Après avoir été dans divers endroits de l’Aragon, elle aurait été transférée à Valence au XVème siècle.
Juan Chapa, professeur à la Faculté de théologie de l’Université de Navarre
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